Le système judiciaire de Montréal a connu un développement important aujourd’hui avec la suspension du procès du milliardaire Robert Miller, fondateur du géant de l’électronique Future Electronics, en raison de problèmes de santé. Le juge Dennis Galiatsatos de la Cour du Québec a statué que Miller, qui fait face à plusieurs accusations liées à des inconduites sexuelles présumées avec des mineures, est actuellement trop malade pour être jugé.
L’homme d’affaires montréalais de 81 ans lutte contre de graves problèmes de santé qui se sont progressivement aggravés au cours des derniers mois. Selon les experts médicaux qui ont témoigné lors de l’audience d’aujourd’hui, l’état de Miller s’est détérioré au point où il ne peut pas participer de façon significative à sa propre défense.
« Cette décision souligne l’équilibre délicat que nos tribunaux doivent maintenir entre la poursuite de la justice et la reconnaissance des situations où la santé d’un accusé empêche véritablement un procès équitable, » a noté Catherine Desmarais, analyste juridique au Barreau de Montréal, présente lors du jugement.
La suspension intervient après une évaluation médicale approfondie menée par des spécialistes désignés par le tribunal. Le Dr Jean-Pierre Arsenault, qui a dirigé l’évaluation, a témoigné que Miller souffre de multiples conditions liées à l’âge qui affectent considérablement ses fonctions cognitives et son endurance physique.
« Le tribunal n’a d’autre choix que de suspendre la procédure jusqu’à ce que l’état de santé de M. Miller puisse s’améliorer suffisamment pour permettre un procès équitable, » a déclaré le juge Galiatsatos lors de l’audience de ce matin. « Le droit d’être présent – mentalement aussi bien que physiquement – pendant son procès est fondamental dans notre système de justice. »
Les ennuis judiciaires de Miller ont commencé en février 2023 suite à un reportage d’enquête d’Enquête de Radio-Canada qui alléguait qu’il avait payé des mineures pour des services sexuels entre 1994 et 2006. L’affaire a depuis attiré une attention considérable à travers le Québec, particulièrement dans le milieu des affaires montréalais où Miller était une figure importante depuis des décennies.
La procureure de la Couronne Martine Bérubé a exprimé sa déception tout en reconnaissant l’obligation du tribunal d’assurer des conditions de procès équitables. « Bien que nous respections la décision du tribunal, nos pensées demeurent avec les présumées victimes qui continuent de chercher une résolution par le système judiciaire, » a déclaré Bérubé aux journalistes à l’extérieur du palais de justice.
Pour les présumées victimes, certaines maintenant dans la quarantaine, la suspension représente un nouveau délai dans leur quête de justice. Marie-Claude Lacroix, intervenante au Centre d’aide aux victimes d’agression sexuelle de Montréal, a souligné le coût émotionnel que de tels délais peuvent entraîner.
« Ces reports peuvent être dévastateurs pour les survivantes qui attendent déjà depuis des années pour que leurs expériences soient reconnues devant les tribunaux, » a expliqué Lacroix. « C’est un rappel douloureux de la façon dont notre système peine parfois à équilibrer des droits concurrents. »
L’affaire a suscité des conversations plus larges sur la richesse, le pouvoir et la responsabilité dans les cercles élitistes de Montréal. Miller, dont la fortune était estimée à 1,6 milliard de dollars par Forbes, a démissionné de Future Electronics peu après que les allégations soient devenues publiques.
Les experts juridiques suggèrent que cette suspension pourrait potentiellement s’étendre sur des mois, voire indéfiniment, selon l’évolution de la santé de Miller. Robert Champagne, un avocat de la défense criminelle non impliqué dans l’affaire, a offert une perspective sur la situation.
« Dans les cas impliquant des accusés âgés avec des problèmes de santé importants, ces suspensions mettent parfois effectivement fin aux poursuites, » a noté Champagne. « Le tribunal programmera probablement des réévaluations périodiques, mais la réalité est que les conditions de santé à l’âge de M. Miller s’améliorent rarement de façon substantielle. »
Les réactions de la communauté à la suspension ont été mitigées. À l’extérieur du palais de justice de Montréal, de petits groupes se sont rassemblés avec des pancartes exprimant à la fois leur soutien aux présumées victimes et leurs préoccupations concernant le processus judiciaire.
« Je suis cette affaire depuis qu’elle a éclaté l’année dernière, » a déclaré Monique Tremblay, une enseignante retraitée qui a rejoint d’autres personnes devant le palais de justice. « C’est frustrant de voir la justice retardée, mais je comprends aussi que notre système doit protéger les droits de toutes les parties concernées. »
Le tribunal a prévu une audience de mise à jour en septembre pour réévaluer l’état de Miller, bien que le juge Galiatsatos ait indiqué que les médecins de Miller fourniront des mises à jour mensuelles aux équipes de la défense et de la poursuite.
Alors que le milieu juridique montréalais analyse ce développement, l’affaire continue de mettre en lumière les défis auxquels notre système judiciaire est confronté lorsqu’il traite des cas complexes impliquant des accusés vieillissants, des allégations graves et l’impact durable sur ceux qui cherchent une résolution par les tribunaux.