Le fils de l’ancien chef de la mafia montréalaise Vito Rizzuto a vu son permis d’exercer le droit suspendu par le Barreau du Québec en raison d’allégations graves liées au crime organisé. Leonardo Rizzuto, qui pratiquait le droit dans un cabinet montréalais depuis plusieurs années, fait maintenant face à des conséquences professionnelles suite à une audience disciplinaire tenue le 28 juin.
La suspension survient après une longue enquête menée par l’ordre professionnel québécois. Bien que Rizzuto ait maintenu son innocence tout au long des diverses procédures judiciaires, le Barreau a déterminé que lui permettre de continuer à exercer le droit représentait des risques potentiels pour le public.
« Cette décision reflète notre engagement à protéger l’intérêt public et à maintenir l’intégrité de la profession juridique, » a déclaré Marie-Claude Sarrazin, porte-parole du Barreau du Québec, lorsque contactée pour commentaire. Elle a souligné que de telles mesures ne sont jamais prises à la légère, mais sont essentielles lorsque des allégations sérieuses sont portées contre des membres.
Cette suspension marque un nouveau chapitre dans la saga des démêlés de la famille Rizzuto avec les forces de l’ordre. Le père de Leonardo, Vito, décédé en 2013, était largement reconnu comme l’une des figures les plus puissantes du crime organisé au Canada, dirigeant ce que les autorités appelaient la Mafia montréalaise pendant des décennies.
Les problèmes juridiques de Leonardo ont commencé sérieusement en 2015 lorsqu’il a été arrêté aux côtés de Stefano Sollecito lors d’une importante opération policière ciblant le crime organisé à Montréal. À l’époque, les autorités alléguaient que les deux hommes avaient assumé des rôles de leadership dans l’organisation criminelle précédemment dirigée par Vito Rizzuto.
Le professeur Antonio Nicaso, qui enseigne des cours sur le crime organisé à l’Université Queen’s, explique l’importance de cette affaire. « La famille Rizzuto est au centre du milieu criminel montréalais depuis des générations. Lorsque des qualifications professionnelles s’entrecroisent avec des liens criminels présumés, les organismes de réglementation doivent réagir de façon décisive. »
Le conseil de discipline du Barreau du Québec déterminera maintenant si des mesures plus permanentes sont justifiées. Leur enquête a examiné non seulement les allégations criminelles, mais aussi si la conduite de Rizzuto violait les normes éthiques exigées des professionnels du droit dans la province.
L’avocate criminaliste montréalaise Sophie Gagnon, qui n’est pas impliquée dans l’affaire, note que ce type d’action est relativement rare. « Le Barreau a l’obligation de protéger la confiance du public envers la profession juridique. Lorsque des allégations graves émergent contre un membre, particulièrement concernant le crime organisé, ils doivent agir tout en respectant le processus équitable. »
La suspension ne représente pas une détermination finale de culpabilité, mais plutôt une mesure préventive. Rizzuto aura l’occasion de présenter sa défense avant que le conseil de discipline ne prenne des décisions permanentes concernant son statut professionnel.
Pour les Montréalais, cette affaire souligne l’héritage persistant du crime organisé dans la ville et soulève des questions sur la façon dont les ordres professionnels devraient réagir lorsque des membres font face à de graves allégations criminelles avant condamnation.
Pierre Tremblay, ancien enquêteur de la GRC spécialisé dans le crime organisé, suggère que cela représente un développement significatif. « Les organismes d’attribution de licences professionnelles sont de plus en plus disposés à prendre des mesures proactives plutôt que d’attendre la conclusion des procédures criminelles. Cela représente une évolution dans la façon dont la société aborde les liens présumés entre les professionnels et le crime organisé. »
La suspension restera en vigueur en attendant d’autres audiences et déterminations par le conseil de discipline du Barreau du Québec. Rizzuto a le droit de faire appel de la décision selon les procédures établies dans le cadre réglementaire professionnel québécois.