J’ai passé hier après-midi à observer une nouvelle addition inattendue sur les trottoirs animés de Montréal – un élégant robot de livraison blanc naviguant soigneusement parmi les piétons le long de la rue Sainte-Catherine. Ces robots autonomes de livraison de nourriture font partie d’un nouveau programme pilote lancé cette semaine dans plusieurs quartiers du Grand Montréal, marquant un changement significatif dans la façon dont les Montréalais pourraient bientôt recevoir leurs commandes de repas.
« C’est comme quelque chose sorti d’un film de science-fiction, mais directement dans nos rues, » a remarqué Sophie Tremblay, propriétaire du Jardin du Lotus, l’un des quinze restaurants locaux participant à la phase initiale. « Nos clients sont absolument fascinés par ces petites machines. »
Le projet pilote de six mois, autorisé par le Bureau d’innovation de la Ville de Montréal, introduit une flotte de 25 robots de livraison autonomes de la startup technologique LivreBot. Chaque unité mesure environ un mètre de haut, se déplace à vitesse de marche et peut transporter jusqu’à trois commandes typiques de nourriture dans son compartiment à température contrôlée.
J’ai observé les piétons de l’heure du lunch qui alternativement fixaient, photographiaient et manœuvraient prudemment autour d’un de ces coursiers mécaniques. La plupart semblaient plus curieux qu’inquiets, bien que certains aient exprimé des réserves.
« Je m’inquiète pour l’accessibilité, » a déclaré Jean Bouchard, un défenseur des droits des personnes handicapées que j’ai interviewé près du Square Phillips. « Nos trottoirs sont déjà difficiles pour les utilisateurs de fauteuils roulants et les personnes malvoyantes. Ajouter des robots à ce mélange nécessite une réflexion approfondie. »
Le Service des transports de Montréal assure aux résidents qu’ils ont établi des directives opérationnelles strictes. Les robots sont programmés pour céder le passage aux piétons, peuvent détecter et naviguer autour des obstacles, et fonctionnent principalement dans des zones moins congestionnées pendant cette phase de test.
Selon les données municipales, les services de livraison de nourriture ont augmenté de près de 40% à Montréal depuis 2020. Cette hausse a créé une demande significative d’innovation dans le secteur, particulièrement alors que les restaurants font face à des défis persistants de personnel et de pressions sur les frais de livraison.
« Cette technologie pourrait potentiellement réduire nos coûts de livraison jusqu’à 30%, » a expliqué Isabelle Lavoie, directrice des opérations au restaurant participant Les Bouchées Urbaines. « Dans ce climat économique difficile, ce genre d’économies pourrait faire une réelle différence pour les petites entreprises comme la nôtre. »
Les implications économiques s’étendent au-delà des opérations de restauration. Le ministère du Développement économique du Québec estime que la technologie de livraison autonome pourrait générer jusqu’à 1 200 nouveaux emplois technologiques et de soutien dans la province au cours des cinq prochaines années si elle est largement adoptée.
Ayant couvert le paysage commercial montréalais depuis plus d’une décennie, j’ai été témoin de nombreuses innovations technologiques qui sont venues et reparties. Ce qui me frappe dans ce développement particulier, c’est comment il mélange la robotique de pointe avec les nécessités quotidiennes d’une manière très visible. Contrairement à de nombreuses avancées technologiques qui opèrent en coulisses, ces robots interagissent physiquement avec notre environnement urbain.
Le projet pilote n’a pas été sans défis initiaux. Le deuxième jour, un robot a temporairement dysfonctionné près de l’avenue du Mont-Royal, causant un petit embouteillage sur le trottoir avant que les techniciens ne résolvent le problème. La PDG de LivreBot, Marie Dubois, a reconnu ces difficultés de croissance comme faisant partie du processus de test.
« Nous nous attendions à quelques accrocs, » m’a dit Dubois lors d’une démonstration à leur bureau du centre-ville de Montréal. « C’est précisément pourquoi nous menons ce projet pilote – pour identifier et résoudre les problèmes avant toute mise en œuvre à plus grande échelle. »
La conseillère municipale Nathalie Bergeron, qui préside le Comité d’innovation et de technologie, a souligné que les retours du public influenceront fortement toutes les décisions concernant l’expansion du programme. « Nous recueillons des données non seulement sur l’efficacité opérationnelle, mais aussi sur la réponse de la communauté et l’interaction avec les piétons, » a expliqué Bergeron.
Pour l’instant, les restaurants participants trouvent que les robots sont au moins des sujets de conversation. Jasmine Roy, qui a commandé son déjeuner via livraison robotisée hier, a décrit l’expérience comme « étrangement excitante. »
« J’ai reçu un texto avec un code pour déverrouiller le compartiment quand il est arrivé devant mon bureau, » a dit Roy. « C’était futuriste mais aussi étrangement personnel – comme si la nourriture était livrée avec un soin particulier. »
La météo pourrait poser le défi le plus immédiat alors que le pilote se poursuit. Les conditions imprévisibles de Montréal mettront à l’épreuve la capacité des robots à naviguer à travers la pluie, le vent, et potentiellement la neige précoce avant que le pilote ne se termine en novembre.
L’Association des sociétés de développement commercial de Montréal rapporte des réactions mitigées des entreprises membres le long des routes de livraison robotisées. Alors que les restaurants participant directement sont enthousiastes, certains commerces de détail ont exprimé des préoccupations concernant la congestion des trottoirs pendant les heures de pointe du magasinage.
Alors que ces coursiers mécaniques deviennent des vues plus familières dans nos rues, la question demeure s’ils représentent une nouveauté passagère ou une véritable évolution dans l’infrastructure de livraison urbaine. La Ville de Montréal prévoit d’organiser des consultations publiques tout au long de la période pilote, avec des dates et des lieux disponibles sur le site web de la ville.
En attendant, si vous rencontrez l’un de ces robots de livraison blancs faisant méthodiquement son chemin le long des trottoirs montréalais, vous êtes témoin de ce qui pourrait être l’avenir de la livraison de nourriture – ou du moins une expérience intéressante sur la façon dont la technologie et la vie urbaine peuvent coexister.