Revue des chasseurs F-35 à Ottawa dans un contexte de tensions commerciales et de retards

Sara Thompson
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Alors que le Parlement reprend sa session d’automne, les couloirs du pouvoir à Ottawa bourdonnent de nouvelles interrogations concernant le programme d’acquisition des avions de chasse F-35 du Canada. Ce projet d’approvisionnement de 7 milliards de dollars, qui promet de livrer 16 avions F-35 d’ici 2026, fait face à des questions croissantes au milieu de retards persistants et de tensions commerciales grandissantes entre le Canada et les États-Unis.

Le ministre de la Défense, Bill Blair, a confirmé hier que son ministère mène actuellement un examen complet du calendrier d’approvisionnement. « Nous restons engagés à moderniser les capacités de notre force aérienne, mais nous devons nous assurer que les Canadiens reçoivent une valeur maximale pour cet investissement considérable, » a déclaré Blair aux journalistes à l’extérieur de la Chambre des communes.

Cet examen survient à un moment particulièrement délicat. La semaine dernière, les premiers pilotes canadiens ont terminé leur formation sur le F-35 à la base aérienne Luke en Arizona, alors même que les délais de livraison continuent de s’allonger sur les graphiques de gestion de projet.

« Nous observons des tendances préoccupantes dans le calendrier de livraison, » note Dre Andrea Charron, directrice du Centre d’études sur la défense et la sécurité de l’Université du Manitoba. « Bien que la formation se poursuive à un bon rythme, les livraisons réelles de matériel font face à des défis persistants qui pourraient avoir un impact sur nos engagements envers le NORAD et nos obligations envers l’OTAN. »

Cette saga d’approvisionnement remonte à 2010 lorsque le gouvernement Harper a annoncé pour la première fois son intention d’acheter ces chasseurs de cinquième génération. Après des années de controverse et une refonte complète du programme sous le gouvernement Trudeau, le Canada a finalement signé des contrats pour ces appareils en janvier 2022.

L’analyste local en aviation militaire Martin Forgues estime que l’examen actuel reflète des préoccupations pragmatiques plutôt qu’un positionnement politique. « Il ne s’agit pas de savoir si le Canada a besoin de chasseurs avancés—nous en avons absolument besoin. Il s’agit de gérer les attentes et les ressources pendant une période de contraintes budgétaires et de défis de fabrication. »

L’Aviation royale canadienne (ARC) continue d’exploiter sa flotte vieillissante de CF-18 en attendant les F-35. Ces appareils, dont beaucoup approchent les 40 ans de service, nécessitent une maintenance de plus en plus intensive pour rester opérationnels.

À la BFC Bagotville, où certains des premiers F-35 canadiens seront éventuellement stationnés, les préparatifs se poursuivent malgré l’incertitude. « Nous transformons l’infrastructure et formons le personnel en fonction des dates d’arrivée prévues, » a déclaré la colonelle Marie-Claude Osmond lors d’une récente visite médiatique. « Tout retard significatif créerait des défis opérationnels auxquels nous devrions faire face. »

L’examen coïncide également avec l’escalade des tensions commerciales entre le Canada et les États-Unis. Les récentes menaces de l’administration Biden concernant les tarifs sur l’aluminium amènent certains analystes de la défense à se demander si le programme d’avions de chasse pourrait s’enchevêtrer dans des différends commerciaux plus larges.

« Les grandes acquisitions de défense existent toujours au sein d’un écosystème politique complexe, » explique Robert Huebert, professeur associé au Département de sciences politiques de l’Université de Calgary. « Bien que les contrats des F-35 soient juridiquement contraignants, les calendriers de mise en œuvre peuvent être influencés par la relation bilatérale plus large. »

Pour les résidents d’Ottawa, ce programme d’approvisionnement a des implications économiques locales. Plusieurs entreprises aérospatiales basées en Ontario détiennent des contrats dans la chaîne d’approvisionnement mondiale du F-35, y compris des entreprises dans la région de la capitale nationale.

« Les retombées industrielles sont substantielles et sensibles au facteur temps, » affirme Janet Thorsteinson, ancienne vice-présidente de l’Association canadienne des industries de défense et de sécurité. « Les retards n’affectent pas seulement la préparation militaire—ils touchent également des emplois hautement qualifiés et les opportunités de transfert de technologie dans toute la région. »

À l’approche de l’hiver, le comité parlementaire de la défense devrait tenir des audiences sur le calendrier d’approvisionnement. Le président du comité, John McKay, a indiqué que l’examen sera « approfondi mais rapide » étant donné l’importance critique du programme pour la sécurité nationale.

Pour l’instant, les Canadiens attendent les résultats de l’examen du ministère de la Défense, prévus avant la fin de l’année. Ces conclusions façonneront probablement non seulement l’avenir des capacités de combat de l’ARC, mais aussi la coopération industrielle de défense entre le Canada et les États-Unis pour les décennies à venir.

En me promenant hier au marché By, je n’ai pu m’empêcher d’entendre des discussions animées sur les priorités de dépenses de défense parmi des membres du personnel parlementaire en congé. La question des F-35 résonne clairement au-delà des cercles militaires—elle touche à notre souveraineté, nos alliances et nos priorités fiscales en ces temps économiques incertains.

Quelles que soient les conclusions qui émergeront de cet examen, une chose demeure certaine : la capacité canadienne en matière d’avions de chasse représente bien plus que du matériel militaire. Elle incarne notre engagement envers la défense continentale, nos obligations internationales et notre place dans un environnement sécuritaire mondial de plus en plus complexe.

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