La répression des réglementations sur les locations à court terme à Montréal pour lutter contre la pénurie de logements

Amélie Leclerc
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En me promenant dans le Plateau le week-end dernier, j’ai remarqué que plusieurs cadenas à clés qui ornaient habituellement les perrons des immeubles avaient mystérieusement disparu – preuve tangible de l’évolution du paysage locatif de notre ville.

L’administration Plante a récemment intensifié l’application des règlements sur les locations à court terme, dans le cadre d’une stratégie plus large visant à résoudre la crise du logement à Montréal. Avec des taux d’inoccupation avoisinant les 2%, trouver un logement abordable est devenu un véritable défi pour de nombreux Montréalais. Ayant vu plusieurs amis peiner à se loger ces dernières années, j’ai constaté personnellement comment les locations touristiques ont transformé certains quartiers.

« Nous faisons face à une pénurie de logements sans précédent, » explique Benoit Dorais, vice-président du comité exécutif de Montréal responsable de l’habitation. « Quand des milliers d’unités sont retirées du marché locatif régulier pour des hébergements touristiques, cela crée une pression considérable sur la disponibilité des logements pour les résidents. »

L’approche de la ville consiste à restreindre Airbnb et les plateformes similaires aux zones touristiques désignées tout en imposant des exigences plus strictes pour les permis. Les autorités ont augmenté les équipes d’inspection et imposent des amendes substantielles aux contrevenants – des pénalités pouvant atteindre 50 000 $ pour les particuliers et 100 000 $ pour les entreprises.

Ma collègue à Logement Montréal, Émilie Tremblay, souligne qu’environ 3 500 logements auparavant listés sur des plateformes de location à court terme pourraient potentiellement revenir sur le marché locatif à long terme. « Chaque appartement qui retourne au logement traditionnel fait une différence pour les familles à la recherche d’un toit stable, » note-t-elle.

Cependant, ces changements ne font pas l’unanimité. Pierre Lavoie, qui exploite deux locations à court terme à Ville-Marie depuis cinq ans, m’a exprimé sa frustration lors de notre conversation au Café Olimpico mardi dernier. « J’ai toujours payé mes impôts et entretenu mes propriétés impeccablement, » dit-il. « Maintenant, je suis forcé de trouver des locataires à long terme ou de vendre complètement mes investissements. »

L’Association hôtelière du Québec soutient ces mesures réglementaires, citant la concurrence déloyale des hébergements non réglementés. « Les établissements autorisés suivent des normes strictes de sécurité et de qualité tout en payant les taxes commerciales appropriées, » déclare Marjolaine Bouchard, porte-parole de l’association. « Ces règlements aident à équilibrer les règles du jeu. »

Pour les visiteurs de notre belle ville, ces changements signifient moins d’options en dehors des hôtels traditionnels et des gîtes enregistrés. Tourisme Montréal prévoit un impact minimal sur la fréquentation globale, mais reconnaît que certains voyageurs – particulièrement les familles cherchant des cuisines équipées ou les groupes nécessitant plusieurs chambres – devront peut-être ajuster leurs attentes.

En traversant Saint-Henri hier matin, j’ai discuté avec plusieurs résidents qui ont exprimé des sentiments mitigés. Sophie Bergeron, locataire de longue date, a accueilli favorablement les changements: « Peut-être que maintenant, je n’aurai plus d’étrangers avec des valises qui entrent constamment dans mon immeuble à toute heure. » De son côté, Marc Tremblay, propriétaire, s’inquiète de l’impact économique: « Le revenu supplémentaire de mon appartement au sous-sol m’aidait à couvrir mon hypothèque. »

Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) milite depuis longtemps pour ces règlements. Leur représentante, Caroline Dupuis, m’a confié: « Le logement est fait pour vivre, pas pour le profit. Nous devons prioriser les résidents plutôt que les touristes. »

Des cadres réglementaires similaires ont émergé dans des villes du monde entier, de Barcelone à New York. Ce qui distingue l’approche de Montréal, c’est son focus spécifique par quartier, reconnaissant que les hébergements touristiques peuvent être appropriés dans le centre-ville mais problématiques dans des zones principalement résidentielles comme Rosemont ou NDG.

Alors que l’hiver approche et que le tourisme ralentit naturellement, nous commencerons à voir si ces efforts d’application se traduisent par une meilleure disponibilité des logements. Le vrai test viendra l’été prochain, lorsque le nombre de visiteurs augmente généralement.

Pour l’instant, les Montréalais continuent leur fameux ballet du déménagement du 1er juillet qui voit des milliers de personnes changer d’adresse simultanément. Peut-être que l’année prochaine, avec potentiellement plus d’unités disponibles, cette tradition annuelle pourrait s’avérer légèrement moins stressante pour ceux qui cherchent un endroit où se sentir chez eux dans notre ville vibrante mais de plus en plus coûteuse.

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