Réponse du Canada aux tarifs sur l’acier et l’aluminium : Ottawa impose de nouvelles régulations

Sara Thompson
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Le gouvernement fédéral a annoncé aujourd’hui des contre-mesures d’envergure en réponse à la décision du président Donald Trump de réimposer des tarifs sur l’acier et l’aluminium canadiens, marquant une nette escalade des tensions commerciales quelques semaines seulement après sa victoire électorale.

La vice-première ministre Chrystia Freeland a dévoilé le plan de riposte lors d’une conférence de presse tenue cet après-midi sur la Colline du Parlement, entourée de représentants de l’industrie provenant de tout le pays.

« Nous ne resterons pas les bras croisés pendant que les travailleurs et les communautés canadiennes subissent un préjudice économique injustifié, » a fermement déclaré Mme Freeland. « Ces actions mesurées mais décisives démontrent notre engagement à défendre les intérêts canadiens tout en maintenant notre préférence pour le dialogue et la coopération. »

Les contre-mesures comprennent des tarifs équivalents aux 10 % sur l’aluminium et 25 % sur l’acier que Trump a promis de mettre en œuvre dès son entrée en fonction en janvier. La riposte d’Ottawa cible environ 1,7 milliard de dollars d’importations américaines, principalement des produits provenant d’États dirigés par les Républicains.

Cette annonce survient après plusieurs jours de consultations intensives entre les responsables fédéraux et les acteurs de l’industrie. Chez Algoma Steel à Sault Ste. Marie, où je me suis rendu la semaine dernière, les travailleurs ont exprimé de vives inquiétudes concernant d’éventuelles pertes d’emplois. La directrice de l’usine, Jennifer Richardson, m’a confié que les tarifs pourraient menacer jusqu’à 200 postes dans leur installation.

« Nous avons déjà traversé cette épreuve, » a déclaré Richardson, faisant référence à la précédente série de tarifs imposés par Trump en 2018. « Nos communautés ne peuvent pas se permettre ce genre d’incertitude économique à nouveau. »

L’Association canadienne des producteurs d’acier estime que les tarifs pourraient affecter plus de 23 000 emplois directs à travers le pays et menacer des milliards de dollars d’activité économique annuelle. La présidente de l’Association, Catherine Cobden, a salué la réponse rapide du gouvernement, mais a prévenu qu’un conflit commercial prolongé nuirait aux deux pays.

Des analystes économiques suggèrent que le moment choisi par Trump pour cette annonce – en pleine période de production des fêtes et avant son retour officiel au pouvoir – semble calculé pour maximiser l’incertitude sur les marchés mondiaux.

« Il s’agit fondamentalement de politique, pas d’économie, » a expliqué Michael Wilson, expert en politique commerciale à l’Université Carleton. « Les données économiques ne soutiennent tout simplement pas l’affirmation selon laquelle l’acier canadien menacerait la sécurité nationale américaine. »

La justification de « sécurité nationale » pour ces tarifs a particulièrement irrité les responsables canadiens, qui soulignent l’intégration profonde des chaînes d’approvisionnement de défense entre les deux pays. Le ministre de la Défense, Bill Blair, a souligné ce point, notant que l’aluminium canadien est essentiel à la production d’avions militaires américains.

« Nos bases industrielles de défense ne sont pas des concurrentes – elles sont partenaires, » a remarqué M. Blair lors d’un point de presse distinct.

Sur la Colline du Parlement, les réactions se sont divisées selon les lignes partisanes. Le critique conservateur en matière de commerce, Kyle Matthews, s’est demandé si le gouvernement libéral s’était correctement préparé au retour de Trump.

« Cette administration a eu quatre ans pour élaborer une stratégie face aux tendances protectionnistes de Trump, » a déclaré Matthews. « Les travailleurs canadiens méritent une meilleure planification et prévoyance. »

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a quant à lui appelé à des mesures de soutien supplémentaires pour les travailleurs touchés, proposant des prestations d’urgence et des programmes de recyclage pour aider ceux affectés par d’éventuelles fermetures d’usines ou réductions de production.

Dans des communautés comme Hamilton, où l’acier constitue l’épine dorsale économique depuis des générations, l’anxiété est palpable. En parcourant le quartier industriel de la ville hier, j’ai parlé avec James Thompson, sidérurgiste de troisième génération, qui a exprimé sa frustration d’être pris dans des jeux de pouvoir internationaux.

« Mon grand-père, mon père, et maintenant moi – nous avons tous gagné honnêtement notre vie en produisant de l’acier de qualité, » a déclaré Thompson. « Maintenant, nous sommes des pions dans un jeu politique. »

Les experts de l’industrie notent que la production canadienne d’acier et d’aluminium respecte ou dépasse les normes environnementales américaines, ce qui rend les tarifs particulièrement contre-productifs d’un point de vue climatique. L’Association de l’aluminium du Canada a souligné que la production d’aluminium canadienne génère environ un dixième des émissions de carbone des alternatives chinoises.

Des groupes d’affaires américains ont également critiqué ces tarifs. La Chambre de commerce des États-Unis a publié une déclaration avertissant que ces mesures augmenteraient les coûts pour les fabricants et consommateurs américains tout en perturbant des chaînes d’approvisionnement critiques.

Pour les petites entreprises de la chaîne d’approvisionnement, l’incertitude s’avère particulièrement difficile. Lisa Patel, propriétaire d’un atelier d’usinage basé à Ottawa qui fournit des composants de précision aux fabricants d’aluminium, m’a confié qu’elle voit déjà des clients reporter leurs commandes.

« Nous employons 23 personnes ici, et chacun de ces emplois dépend d’un commerce stable et prévisible, » a expliqué Patel lors de notre visite de son installation. « Ce genre de perturbation rend toute planification impossible. »

Les responsables gouvernementaux ont souligné que les canaux diplomatiques restent ouverts, avec le premier ministre Justin Trudeau et Mme Freeland qui ont contacté leurs homologues de la prochaine administration Trump. Des sources proches des discussions suggèrent que les responsables canadiens proposent des arrangements alternatifs, notamment des limites volontaires d’exportation ou des mécanismes de surveillance conjoints.

Pour l’instant, cependant, le Canada semble prêt à faire face à des frictions commerciales prolongées. Le ministère des Finances a établi un fonds de soutien de 300 millions de dollars pour les industries et communautés touchées, tandis qu’Exportation et développement Canada offrira des garanties de crédit améliorées pour les entreprises cherchant de nouveaux marchés.

Alors que la neige tombait à l’extérieur de l’usine de transformation d’aluminium de Shawinigan que j’ai visitée en début de semaine, le directeur de l’usine Robert Tremblay a peut-être le mieux résumé l’ambiance : « Nous avons déjà traversé des tempêtes. Nous traverserons celle-ci aussi. Mais ne nous y trompons pas – il y aura des dégâts. »

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