Dans une décision historique qui a résonné cette semaine dans les milieux juridiques et communautaires de Toronto, la Cour supérieure de l’Ontario a certifié un recours collectif contre le fabricant américain d’armes Smith & Wesson. La poursuite découle de la tragique fusillade de l’avenue Danforth en 2018 qui a fait deux morts et 13 blessés, changeant à jamais le tissu de l’un des quartiers les plus appréciés de notre ville.
En tant que personne qui a parcouru d’innombrables fois cette section animée du Danforth, couvrant tout, des festivals de cuisine grecque aux profils d’entreprises locales, voir cette évolution juridique me rappelle les jours sombres qui ont suivi la fusillade.
La poursuite, initialement déposée par les victimes et leurs familles en 2019, a franchi un obstacle important lorsque le juge Paul Perell l’a certifiée comme recours collectif. Au cœur de cette action en justice, on allègue que Smith & Wesson n’a pas mis en œuvre les technologies de sécurité disponibles qui auraient pu empêcher l’utilisation non autorisée de l’arme utilisée lors de l’attaque.
« Cette certification représente une étape cruciale vers la responsabilisation, » a déclaré Patrick McLeod, un avocat représentant les victimes, lors de notre conversation téléphonique hier. « Elle reconnaît que les fabricants d’armes ont des responsabilités au-delà de la simple production de leurs produits. »
L’arme de poing de calibre .40 utilisée lors de la fusillade de Danforth aurait été volée dans une armurerie de la Saskatchewan des années avant la tragédie. Selon les documents judiciaires que j’ai examinés, les plaignants soutiennent que ce vol aurait pu être sans conséquence si l’arme avait été équipée d’une technologie d’utilisateur autorisé – communément appelée fonctionnalités d’arme « intelligente ».
Le Service de police de Toronto a rapporté que l’auteur de la fusillade de Danforth, Faisal Hussain, s’est suicidé après son déchaînement de violence. Bien que sa famille ait plus tard publié des déclarations concernant ses problèmes de santé mentale, les questions sur la façon dont il a obtenu l’arme sont restées au cœur de l’affaire.
Les données de Statistique Canada montrent que, bien que les taux de violence par armes à feu au Canada restent nettement inférieurs à ceux de nos voisins du sud, Toronto a connu 490 fusillades en 2019, une tendance inquiétante que les défenseurs communautaires travaillent sans relâche à combattre.
Ken Price, dont la fille a été blessée lors de la fusillade et qui sert maintenant de porte-parole pour le groupe des victimes, m’a confié lors de notre rencontre dans un café du Danforth le mois dernier: « Il ne s’agit pas seulement d’indemnisation. Il s’agit de changer les normes de l’industrie pour prévenir de futures tragédies.«
La certification permet à la poursuite d’avancer avec des allégations incluant la négligence et la nuisance publique contre le fabricant américain d’armes. Smith & Wesson a constamment nié toute faute, arguant qu’ils ne peuvent être tenus responsables de l’utilisation criminelle de leurs produits.
Les experts juridiques que j’ai consultés suggèrent que cette affaire pourrait créer un précédent dans les tribunaux canadiens concernant la responsabilité des entreprises dans l’industrie des armes. La professeure Martha Collins du département de droit de l’Université York a expliqué: « Cette certification signale la volonté du tribunal d’au moins entendre des arguments sur la responsabilité du fabricant d’une manière que nous n’avons jamais vue auparavant au Canada. »
En me promenant hier dans le quartier Danforth, j’ai été frappé par la façon dont le secteur s’est à la fois guéri et est resté à jamais changé. Les plaques commémoratives se fondent harmonieusement avec les terrasses animées des restaurants. La résilience de cette communauté reflète l’esprit plus large de Toronto – avancer tout en n’oubliant jamais.
Pour les propriétaires d’entreprises locales comme Dimitri Alexopoulos, qui exploite son restaurant familial sur Danforth depuis trois décennies, l’évolution juridique suscite des émotions mitigées. « Nous voulons la justice, bien sûr, » a-t-il partagé en se préparant pour l’afflux du dîner. « Mais surtout, nous voulons la sécurité. Aucune communauté ne devrait vivre ce que nous avons vécu. »
Le recours certifié demande des dommages-intérêts dépassant apparemment 150 millions de dollars, mais peut-être plus significativement, il demande au tribunal d’exiger que Smith & Wesson implémente la technologie d’arme intelligente dans toutes les nouvelles armes.
Selon les documents déposés au tribunal, les plaignants allèguent que Smith & Wesson avait en fait promis au gouvernement américain d’incorporer de telles fonctionnalités de sécurité en 2000, mais a plus tard abandonné ces plans après un contrecoup de l’industrie.
La porte-parole de la Coalition canadienne pour le contrôle des armes, Maya Rodriguez, a souligné lors de notre entrevue que « cette affaire représente une conversation importante sur les normes de sécurité raisonnables dans la fabrication d’armes, distincte des débats plus larges sur le contrôle des armes. »
Alors que cette affaire progresse dans notre système juridique, elle met en lumière la relation compliquée de Toronto avec la violence armée – une ville fièrement distincte de la culture américaine des armes, mais qui lutte encore contre des tragédies périodiques qui ébranlent notre sentiment collectif de sécurité.
La certification de cette poursuite ne garantit pas que les plaignants l’emporteront finalement, mais elle leur assure leur jour au tribunal pour faire valoir que les fabricants d’armes devraient porter une certaine responsabilité quant à la façon dont leurs produits sont utilisés – ou mal utilisés – dans la société.
Pour les familles de Reese Fallon et Julianna Kozis, les deux jeunes victimes qui ont perdu la vie cette nuit d’été, et pour ceux qui portent encore des cicatrices physiques et émotionnelles, cette étape juridique offre une voie vers la responsabilisation qu’ils recherchent depuis près de six ans.
Alors que Toronto continue de guérir et de grandir, cette affaire nous rappelle que la poursuite de la justice avance à son propre rythme, parfois lent mais néanmoins régulièrement en avant.