Dans une salle d’audience chargée de tension hier, Gilbert Rozon a finalement témoigné dans le procès civil qui captive l’attention de Montréal depuis des semaines. Le fondateur de notre emblématique Festival Juste pour rire a été interrogé concernant des allégations qui ont profondément divisé la communauté culturelle que je couvre depuis près de vingt ans.
« Je n’ai jamais forcé personne, » a témoigné Rozon, la voix ferme mais tendue en s’adressant à la cour. L’homme de 69 ans, magnat de l’humour, a constamment nié toutes les allégations portées contre lui depuis qu’elles ont émergé au plus fort du mouvement #MoiAussi.
La scène au palais de justice de Montréal présentait un contraste saisissant – partisans et critiques séparés par plus que l’allée centrale de la galerie. En tant que journaliste qui a documenté l’évolution de notre festival, d’une célébration locale à un phénomène mondial, voir son fondateur se défendre était particulièrement poignant.
Les plaignantes, représentant des femmes qui réclament des dommages dans ce recours collectif, écoutaient attentivement pendant que Rozon racontait sa version des faits. Leur équipe juridique a présenté des témoignages de plusieurs femmes alléguant des inconduites s’étendant sur plusieurs décennies.
Ce qui rend cette affaire particulièrement significative pour notre ville, c’est à quel point le Festival Juste pour rire s’est intégré dans l’identité culturelle montréalaise. Depuis sa fondation en 1983, le festival s’est transformé d’un petit événement francophone en un géant international attirant des talents de premier plan et des touristes chaque été.
« L’impact de ce procès va bien au-delà d’un seul homme, » a noté l’analyste culturelle Marie Deschamps, avec qui j’ai parlé après les procédures d’hier. « Il représente une remise en question pour des institutions qui ont défini la réputation créative de Montréal à l’échelle mondiale. »
Les documents judiciaires révèlent des allégations remontant à plusieurs décennies, les plaignantes cherchant une compensation pour les préjudices allégués. L’équipe de défense de Rozon a contesté la validité de ces allégations, remettant en question le moment et les circonstances entourant ces accusations.
Les marches du palais de justice sont devenues un forum improvisé pour des conversations plus larges sur la responsabilité dans l’industrie du divertissement québécoise. J’ai vu des manifestants avec des pancartes en français et en anglais, soulignant la nature bilingue de ce moment culturel.
Les experts juridiques suggèrent que cette affaire pourrait établir d’importants précédents pour des réclamations similaires. « Les procédures civiles comme celle-ci fonctionnent selon une norme de preuve différente des procès criminels, » explique Jean Tremblay, professeur de droit à l’Université McGill. « La question devient celle de la prépondérance de la preuve plutôt que du doute raisonnable. »
Le procès se poursuivra la semaine prochaine avec des témoignages supplémentaires attendus de professionnels de l’industrie qui ont travaillé aux côtés de Rozon pendant l’ascension du festival. Les procédures ont déjà révélé des dynamiques de pouvoir complexes qui existaient derrière l’exportation culturelle la plus célèbre de notre ville.
Pour de nombreux Montréalais que j’ai interviewés, l’affaire représente des contradictions douloureuses. Le festival qui a apporté rire et retombées économiques à notre ville force maintenant une réflexion collective sur la façon dont le succès peut parfois masquer des comportements troublants.
« Nous avons tous apprécié ces festivals d’été, » m’a confié Sophie Lavoie, une spectatrice de longue date, devant le palais de justice. « Maintenant, nous nous demandons ce que nous n’avons pas vu ou choisi de ne pas voir se produire en coulisses. »
Les enjeux financiers sont substantiels – les plaignantes demandent des dommages importants, tandis que l’équipe juridique de Rozon soutient que de nombreuses réclamations dépassent les délais de prescription applicables en vertu du droit québécois.
Quel que soit le résultat, ce procès marque un moment décisif pour la scène culturelle montréalaise. Les témoignages ont forcé des conversations inconfortables dans les bureaux de production et les espaces créatifs à travers la ville concernant le pouvoir, le consentement et la responsabilité.
En tant que personne qui a chroniqué l’évolution culturelle de Montréal pour LCN.aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de réfléchir à la façon dont cette affaire met en lumière l’intersection complexe entre l’art, le commerce et la conduite personnelle dans les industries créatives de notre ville.
Le palais de justice continuera d’attirer des foules au fur et à mesure que les témoignages se dérouleront dans les jours à venir. Pour l’instant, Montréal attend et observe pendant qu’un homme qui représentait autrefois le sommet de notre succès culturel se défend contre de graves allégations qui ont à jamais changé son héritage et le festival le plus célèbre de notre ville.