La peur était encore palpable dans la voix d’Élisabeth Connors alors qu’elle racontait ces cinq jours terrifiants à l’Hôpital pour enfants de l’Alberta. Sa fille Sophia, âgée de quatre mois, trop jeune pour recevoir son vaccin contre la rougeole prévu, avait contracté cette maladie hautement contagieuse.
« Les médecins m’ont dit que nous l’avions attrapée juste à temps, » m’a confié Élisabeth lors de notre entretien à son domicile d’Airdrie, juste au nord de Calgary. « Un jour de plus et elle n’aurait peut-être pas survécu. Je n’ai jamais été aussi terrifiée de ma vie. »
Le cas de Sophia illustre une tendance inquiétante dans toute l’Alberta. Selon les Services de santé de l’Alberta, les cas de rougeole ont augmenté de 27% au cours des six derniers mois par rapport à l’ensemble de 2024. Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est que 62% de ces cas concernaient des personnes non vaccinées, tandis que les autres touchaient des enfants trop jeunes pour recevoir leur première dose.
La Dre Maria Henderson, médecin-chef pour la zone de Calgary, a expliqué la gravité de la situation. « Nous constatons les conséquences de la baisse des taux de vaccination en dessous du seuil de 95% nécessaire pour l’immunité collective. Quand cela se produit, les plus vulnérables—comme les nourrissons de moins de 12 mois—courent le plus grand risque. »
Le calendrier standard du vaccin RRO (rougeole, rubéole, oreillons) en Alberta prévoit la première dose à 12 mois et la seconde entre 4 et 6 ans. Cela laisse les nourrissons particulièrement vulnérables pendant leur première année de vie.
Pour Élisabeth, dont les enfants plus âgés sont entièrement vaccinés, cette expérience l’a transformée en une militante inattendue. « Avant cela, je respectais les choix des gens concernant les vaccins, même si je n’étais pas d’accord. Maintenant? Je ne peux pas rester silencieuse. Pas quand des bébés comme Sophia paient le prix de la désinformation. »
Cette désinformation continue de circuler dans Calgary et les communautés environnantes, malgré les preuves scientifiques écrasantes soutenant la sécurité et l’efficacité des vaccins. Une étude récente de l’Université de Calgary a révélé que le sentiment anti-vaccin a gagné du terrain dans certaines poches de la province, particulièrement après la pandémie.
« Nous faisons face à une tempête parfaite, » a expliqué la Dre Henderson. « La fatigue pandémique, la méfiance générale envers les institutions et des campagnes de désinformation très organisées ont créé des lacunes dangereuses dans notre bouclier d’immunité. »
La conseillère municipale Jyoti Gondek a appelé à une augmentation du financement de la santé publique pour lutter contre l’hésitation vaccinale. « Ce n’est pas seulement une question de santé; il s’agit de protéger nos citoyens les plus vulnérables. Quand nous voyons des maladies évitables menacer nos enfants, nous devons agir de manière décisive. »
La réponse provinciale a été mitigée. Si le ministre de la Santé Jason Copping a annoncé 3,2 millions de dollars supplémentaires pour les campagnes de sensibilisation aux vaccins le mois dernier, les critiques soutiennent qu’une intervention plus directe est nécessaire.
Le Dr Robert Stevens, spécialiste des maladies infectieuses pédiatriques à l’Université de l’Alberta, estime que des mesures plus fortes devraient être envisagées. « Nous devons examiner ce qui fonctionne ailleurs. Plusieurs provinces ont mis en place des exigences d’entrée scolaire pour les vaccins infantiles standard, ce qui s’est avéré efficace pour maintenir des taux de couverture élevés. »
De retour à Airdrie, Élisabeth m’a montré la chambre de Sophia, maintenant transformée avec des équipements médicaux pour sa convalescence. La petite bouteille d’oxygène à côté de son berceau est un rappel brutal de la gravité potentielle de la rougeole.
« Elle devient plus forte chaque jour, » a dit Élisabeth, caressant doucement la main de sa fille. « Mais elle n’aurait jamais dû avoir à mener cette bataille. »
Pour les parents de Calgary qui se demandent comment protéger leur famille, la Dre Henderson a offert des conseils clairs: « Assurez-vous que les vaccinations de votre famille sont à jour. Si vous n’êtes pas sûr de votre statut immunitaire, contactez votre professionnel de la santé pour des tests ou des rappels. Et rappelez-vous, se faire vacciner n’est pas seulement pour vous protéger—c’est pour protéger les personnes vulnérables comme Sophia qui ne peuvent pas encore recevoir le vaccin. »
Les Services de santé de l’Alberta ont établi plusieurs cliniques de vaccination temporaires dans tout Calgary en réponse à l’épidémie. Les lieux et horaires peuvent être trouvés sur le site web des AHS.
Alors que notre ville fait face à cette crise sanitaire évitable, les derniers mots d’Élisabeth résonnent profondément. « Je pensais autrefois que le pire pour un parent était de voir son enfant souffrir. Maintenant, je sais que c’est de les voir souffrir de quelque chose qui n’aurait jamais dû se produire. »
Avec les cas de rougeole qui continuent d’augmenter dans toute l’Alberta, son avertissement sert de puissant rappel de ce qui est vraiment en jeu dans notre conversation continue sur la santé publique.