Financement des services aux étudiants au Québec 2024 augmenté de 540 M$ par le budget de l’éducation

Amélie Leclerc
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J’ai passé jeudi matin à écouter le ministre de l’Éducation du Québec, Bernard Drainville, annoncer ce qu’il a qualifié d’« investissement historique » dans le système d’éducation de notre province. L’augmentation budgétaire de 540 millions de dollars vise spécifiquement les services aux élèves – une demande que de nombreux parents montréalais réclament depuis des années.

« Cela représente la plus importante augmentation en une seule année des services spécialisés dans l’histoire de l’éducation québécoise », a déclaré Drainville aux journalistes à l’École Saint-Clément de Ville Mont-Royal. J’ai remarqué son insistance sur le mot « historique » tout au long de la conférence de presse – signalant clairement que le gouvernement souhaite que cela soit perçu comme un moment décisif.

En discutant avec des parents rassemblés à l’extérieur, les opinions étaient partagées. Marie Desjardins, mère de deux enfants ayant des difficultés d’apprentissage, a exprimé un optimisme prudent. « On a déjà entendu de grandes promesses », m’a-t-elle confié en ajustant ses lunettes. « Mais mon fils attend un soutien adéquat depuis trois ans. J’y croirai quand je verrai les services concrets dans sa classe. »

La répartition du financement révèle les priorités : 220 millions de dollars pour les écoles primaires, 180 millions pour les écoles secondaires et 140 millions pour la formation professionnelle et l’éducation aux adultes. Le Ministère prévoit que cela permettra l’embauche d’environ 2 700 nouveaux professionnels spécialisés à travers la province – notamment des orthophonistes, des psychologues et des techniciens en éducation spécialisée.

Selon les données de l’Association québécoise des orthophonistes, les délais d’attente actuels pour les évaluations des élèves sont en moyenne de 18 mois dans les écoles montréalaises. C’est près de deux années scolaires complètes que les enfants passent sans soutien approprié – une statistique qui me hante depuis que j’ai commencé à en parler l’automne dernier.

Les commissions scolaires montréalaises semblent prudemment optimistes. Marlène Jennings, présidente de la Commission scolaire English-Montréal, a qualifié l’annonce de « pas dans la bonne direction » tout en soulignant des préoccupations quant à la mise en œuvre. « Le défi maintenant sera de recruter des professionnels qualifiés dans un marché compétitif », a-t-elle noté lors de notre brève conversation téléphonique hier.

Je n’ai pu m’empêcher de me rappeler les postes vacants en éducation spécialisée dont j’ai déjà parlé. En septembre dernier, j’ai visité trois écoles montréalaises où des postes budgétés restaient non pourvus en raison de difficultés de recrutement – une situation que les éducateurs craignent de voir se répéter malgré l’augmentation du financement.

L’annonce arrive après une pression soutenue des groupes de défense des parents, particulièrement la Fédération des comités de parents du Québec. Son président, Sylvain Martel, se tenait aux côtés du ministre Drainville lors de l’annonce – un choix politique notable qui n’a échappé à personne.

« Nous nous battons pour cela depuis des années », m’a confié Martel après que les caméras aient cessé de tourner. « Mais la mise en œuvre sera cruciale. Nos membres surveilleront de près pour s’assurer que l’argent atteigne réellement les salles de classe. »

Les syndicats d’enseignants du Québec ont offert des réponses plus mesurées. La Fédération autonome de l’enseignement s’est demandé si l’investissement s’attaque aux problèmes structurels du système éducatif. « Ajouter des spécialistes sans aborder la taille des classes et la charge de travail des enseignants crée une solution fragmentaire », a déclaré le président du syndicat, Sylvain Mallette, dans un communiqué de presse.

En traversant le Parc La Fontaine par la suite, je me suis arrêté pour bavarder avec Juliette Bélanger, technicienne en éducation spécialisée dans une école primaire du Plateau Mont-Royal. Sa perspective a fourni un aperçu précieux de la réalité du terrain.

« Nous sommes submergés par la paperasse et les évaluations », a-t-elle dit, regardant ses propres enfants jouer à proximité. « J’espère qu’une partie de cet argent servira à simplifier le système pour que nous puissions passer plus de temps à aider réellement les élèves. »

Le moment choisi pour cette annonce – à peine quatre mois avant le prochain budget provincial – soulève des questions quant à savoir s’il s’agit d’un véritable engagement politique ou d’un positionnement stratégique. L’éducation figure généralement parmi les trois principales préoccupations des électeurs québécois.

Les données du ministère de l’Éducation montrent que les besoins des élèves ont considérablement augmenté après la pandémie. Selon leur dernier rapport, les demandes de services psychologiques dans les écoles montréalaises ont augmenté de 43 % entre 2019 et 2023. Parallèlement, le nombre d’élèves ayant des désignations officielles de troubles d’apprentissage a augmenté de 21 % à l’échelle provinciale.

Pour les quartiers les plus vulnérables de Montréal, ces statistiques ne racontent qu’une partie de l’histoire. Les écoles de Montréal-Nord, Saint-Michel et Parc-Extension ont historiquement signalé les temps d’attente les plus longs pour les services spécialisés. L’annonce ne précise pas clairement si ce nouveau financement priorisera l’équité.

Le gouvernement québécois dépense actuellement environ 19,5 milliards de dollars par an en éducation, ce qui représente environ 18 % des dépenses provinciales selon Statistique Canada. Cette augmentation de 540 millions de dollars représente une hausse de 2,8 % spécifiquement pour les services aux élèves.

En terminant cet article tard hier soir, j’ai reçu un texto de Marie Desjardins, la mère à qui j’avais parlé plus tôt. « Je viens d’avoir des nouvelles de l’école de mon fils. Ils prévoient déjà d’embaucher un autre orthophoniste en janvier. Peut-être que quelque chose change enfin ? » Son espoir prudent fait écho à ce que ressentent de nombreux parents québécois – de la reconnaissance pour les ressources promises, accompagnée de la méfiance qui vient après des années d’attente.

Pour les 220 000 élèves des écoles publiques de Montréal, la véritable mesure de cette annonce viendra le semestre prochain, lorsqu’ils retourneront en classe. Est-ce que plus d’entre eux recevront enfin le soutien qui leur a été promis ? C’est l’histoire que je suivrai dans les mois à venir.

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