La lutte de Montréal contre l’insécurité alimentaire a reçu un coup de pouce important cette semaine avec la distribution de 2 millions de dollars aux organismes alimentaires à travers la ville. Cet investissement arrive à point nommé alors que de nombreuses familles montréalaises continuent de faire face à la hausse des coûts d’épicerie et à l’incertitude économique.
L’annonce, faite hier au Centre alimentaire communautaire de Côte-des-Neiges, apporte un soulagement bienvenu aux organismes qui constatent une demande sans précédent pour leurs services. Moisson Montréal, la plus grande banque alimentaire de la ville, rapporte une augmentation de 33 % des visites mensuelles depuis l’an dernier – la plus forte hausse de ses 40 ans d’histoire.
« Ce financement arrive à un moment crucial », explique Catherine Marcil, directrice générale de Moisson Montréal. « Nous voyons beaucoup de nouveaux utilisateurs – des familles qui travaillent, des étudiants, des aînés à revenu fixe – des gens qui n’auraient jamais imaginé avoir besoin d’aide alimentaire. »
Les 2 millions de dollars seront répartis entre 24 organismes de sécurité alimentaire à travers Montréal, avec des allocations basées sur les besoins communautaires et la capacité organisationnelle. Parmi les bénéficiaires figurent des banques alimentaires de quartier, des cuisines collectives et des initiatives innovantes en sécurité alimentaire sur toute l’île.
Selon les récentes statistiques de Banques alimentaires Canada, le Québec a connu une augmentation de 25 % de l’utilisation des banques alimentaires depuis 2021, Montréal affichant des hausses encore plus marquées dans certains quartiers. Notre-Dame-de-Grâce, Parc-Extension et Montréal-Nord ont signalé certaines des plus fortes augmentations de demandes d’aide alimentaire.
La Corbeille Bordeaux-Cartierville, l’un des organismes bénéficiaires, prévoit d’élargir ses ateliers « cuisiner à petit budget » et ses services de livraison alimentaire pour les aînés à mobilité réduite. « Au-delà de l’aide alimentaire d’urgence, nous avons besoin de solutions durables qui s’attaquent aux causes profondes de l’insécurité alimentaire », note François Lamontagne, leur coordonnateur de programmes.
Le financement provient d’une initiative conjointe provinciale-municipale visant à renforcer le réseau de sécurité alimentaire de Montréal. La mairesse Valérie Plante a assisté à l’annonce d’hier, soulignant l’engagement de la ville à garantir l’accès à une alimentation nutritive pour tous les Montréalais.
Je suis particulièrement touchée par cette initiative car j’ai récemment visité plusieurs banques alimentaires pour un reportage. Les témoignages que j’ai entendus étaient bouleversants – des familles qui doivent choisir entre payer le loyer ou nourrir leurs enfants. C’est une réalité difficile qui touche plus de Montréalais qu’on ne l’imagine.
L’allocation des fonds a été saluée pour son approche communautaire. Chaque organisme bénéficiaire a soumis des propositions détaillées décrivant comment les fonds répondraient aux besoins spécifiques du quartier. Cela garantit que les solutions sont culturellement appropriées et adaptées aux défis locaux.
Parmi les programmes diversifiés recevant un soutien figurent des jardins collectifs à Hochelaga-Maisonneuve, des marchés mobiles apportant des produits frais dans les déserts alimentaires, et des programmes soutenant spécifiquement les nouveaux arrivants peu familiers avec les systèmes alimentaires locaux.
« L’insécurité alimentaire ne concerne pas seulement la faim – elle affecte la santé, l’éducation, l’emploi et le bien-être communautaire », explique Dre Geneviève Mercille du Département de nutrition de l’Université de Montréal. « Ces investissements en sécurité alimentaire bénéficient ultimement à notre système de santé et à notre économie. »
Cependant, certains défenseurs communautaires soutiennent que, bien que le financement soit bienvenu, des changements structurels à plus long terme sont nécessaires. « Nous apprécions ce soutien, mais les banques alimentaires n’ont jamais été conçues comme des solutions permanentes », déclare Jean-Paul Faniel de la Table de concertation sur la faim de Montréal. « Nous avons besoin de politiques qui s’attaquent aux inégalités de revenus, au logement abordable et aux salaires décents. »
La Ville de Montréal rapporte que l’insécurité alimentaire touche environ 13 % des ménages, avec des taux significativement plus élevés parmi les familles monoparentales, les immigrants récents et les communautés autochtones.
Plusieurs organismes financés explorent des approches innovantes au-delà des modèles traditionnels de banques alimentaires. Le Dépôt alimentaire NDG élargit son programme d’agriculture urbaine, enseignant aux résidents à cultiver des aliments dans des espaces communautaires tout en fournissant des produits frais à leur programme de paniers alimentaires.
Les experts en sécurité alimentaire soulignent que de nombreux Montréalais confrontés à l’insécurité alimentaire travaillent mais luttent avec des salaires bas et des coûts de logement élevés. Les « travailleurs pauvres » représentent maintenant près de 30 % des utilisateurs de banques alimentaires dans la ville, selon la plus récente analyse de Centraide.
Les organismes recevant du financement doivent fournir des rapports trimestriels détaillant les mesures d’impact et la prestation de services. Cette mesure de responsabilisation assure une utilisation efficace des ressources tout en fournissant des données précieuses sur l’évolution des besoins communautaires.
L’investissement de 2 millions de dollars, bien que significatif, ne représente qu’une composante de la stratégie plus large de sécurité alimentaire de Montréal. D’autres initiatives comprennent la réduction du gaspillage alimentaire par des programmes de récupération, le soutien à l’agriculture locale et le développement de conseils de politique alimentaire de quartier.
En terminant mes entrevues avec les participants à l’annonce d’hier, une bénévole m’a approchée. « Ce financement signifie que nous pouvons aider plus de familles, mais la vraie question est de savoir pourquoi tant de personnes ont besoin de banques alimentaires dans une ville riche comme Montréal », a-t-elle dit. Ses paroles soulignent le défi complexe qui nous attend – répondre à la faim immédiate tout en travaillant vers une ville où chacun a un accès fiable à une alimentation saine et abordable.