Je me souviens vivement de jeudi dernier. La pluie s’abattait sur l’emblématique campus de McGill tandis que les étudiants-athlètes se rassemblaient dans un silence stupéfait, plusieurs avec des larmes coulant sur leurs visages. L’Université McGill venait d’annoncer sa décision de supprimer près de la moitié de ses programmes sportifs universitaires – une mesure qui a envoyé des ondes de choc à travers la communauté athlétique montréalaise.
« C’est comme perdre une partie de moi-même, » a murmuré Emma Lavoie, nageuse de troisième année dont l’équipe fait face à l’élimination. Nous étions abrités sous les portes Roddick alors qu’elle cherchait ses mots. « Quatre générations de ma famille ont compétitionné pour McGill. Maintenant, c’est simplement… fini. »
L’annonce de McGill est tombée sans avertissement la semaine dernière. L’université supprimera 16 de ses 35 équipes universitaires, affectant plus de 300 étudiants-athlètes. Parmi les programmes menacés figurent la natation, le baseball et le ski alpin – des sports aux racines historiques profondes dans l’établissement.
L’université cite les pressions financières comme raison principale. Selon Linda Gaudreau, directrice de l’athlétisme et des loisirs, maintenir toutes les équipes était devenu « financièrement insoutenable. » Elle a expliqué lors d’une conférence de presse lundi que « McGill fait face à un déficit sportif de 4,5 millions de dollars qui nécessite une action immédiate. »
Mais beaucoup d’athlètes se sentent pris au dépourvu par la décision et son timing. « Ils ont attendu jusqu’au milieu de la saison pour nous le dire, » déplore Thomas Renaud, capitaine de l’équipe de baseball. « Certains d’entre nous ont refusé d’autres écoles pour jouer ici. Maintenant, nous sommes coincés. »
Le département d’athlétisme de McGill prévoit de concentrer ses ressources sur moins de programmes pour maintenir l’excellence compétitive. Le basketball, le football, le hockey et l’aviron continueront, tout en redirigeant environ 2 millions de dollars annuellement des programmes coupés.
Les implications s’étendent au-delà des frontières du campus. La filière sportive jeunesse de Montréal s’est longtemps appuyée sur les programmes universitaires comme destinations d’aspiration pour les jeunes athlètes.
Pierre Desjardins, qui entraîne la natation au Club Aquatique CAMO à Montréal, craint les effets en cascade. « Les jeunes ont besoin de ces équipes universitaires pour aspirer à quelque chose. Sans la natation de McGill, nous perdons un maillon crucial dans le système de développement québécois. »
Les coupes arrivent également à un moment délicat pour le sport canadien. Après la performance décevante du pays aux Jeux olympiques de Paris, de nombreux experts ont appelé à un investissement accru dans le sport amateur. La décision de McGill semble aller dans la direction opposée.
« Les universités sont essentielles à notre infrastructure sportive nationale, » explique Danielle Marchand, ancienne nageuse olympique et analyste sportive montréalaise. « Quand des institutions comme McGill se retirent, cela crée des lacunes qui peuvent prendre des décennies à réparer. »
Les étudiants-athlètes n’acceptent pas la décision en silence. Une pétition lancée samedi a déjà recueilli plus de 7 500 signatures. Les anciens élèves se sont également mobilisés, plusieurs diplômés éminents promettant un soutien financier pour sauver les équipes menacées.
Marc Thibault, qui a compétitionné pour l’équipe de ski alpin de McGill dans les années 1990, a aidé à organiser un comité d’anciens préoccupés. « Nous explorons toutes les options, y compris la collecte de fonds privés et d’éventuelles contestations juridiques. Ces programmes définissent l’identité de McGill autant que les études académiques. »
L’université maintient que les coupes étaient nécessaires et développées après une analyse minutieuse. Les responsables soulignent des réductions similaires dans d’autres universités canadiennes confrontées à des contraintes budgétaires. L’Université Concordia a effectué des coupes comparables en 2019, bien qu’à une échelle plus réduite.
Pour de nombreux étudiants-athlètes, l’impact va au-delà du sport. « Mon équipe était ma famille loin de chez moi, » explique Sophia Williams, joueuse de hockey sur gazon originaire de Vancouver. « Mes performances académiques se sont améliorées grâce à la discipline et au système de soutien de l’athlétisme. »
McGill affirme que les étudiants touchés peuvent conserver leur bourse jusqu’à l’obtention de leur diplôme, mais beaucoup se sentent désorientés sans leurs équipes. Certains explorent déjà des options de transfert vers d’autres universités, créant potentiellement un exode de talents de Montréal.
En traversant le campus hier après-midi, j’ai remarqué les affiches qui apparaissaient déjà – « Sauvons le sport de McGill » écrit en anglais et en français. Les organisateurs étudiants prévoient une manifestation mardi prochain devant le bâtiment administratif.
Cette histoire continue d’évoluer, l’impact final sur le paysage sportif montréalais restant encore flou. Ce qui demeure certain, c’est que des centaines d’étudiants-athlètes font face à un carrefour inattendu, et que la tradition athlétique de McGill entre dans un chapitre incertain.
Debout sous ces portes historiques sous la pluie la semaine dernière, regardant les étudiants dévastés assimiler leur nouvelle réalité, je ne pouvais m’empêcher de me demander ce que cela signifie pour les futurs espoirs olympiques de Montréal et la culture sportive communautaire. Certaines traditions, une fois brisées, s’avèrent difficiles à reconstruire.