Couche-Tard Retire son Offre d’Acquisition de 7-Eleven

Amélie Leclerc
6 Min Read

Dans un revirement surprenant pour le paysage des affaires québécois, Alimentation Couche-Tard a officiellement retiré son offre d’acquisition de Seven & i Holdings, la société mère japonaise du géant des dépanneurs 7-Eleven. L’entreprise lavalloise a annoncé sa décision hier, mettant fin à ce qui aurait été l’une des plus importantes acquisitions internationales canadiennes de ces dernières années.

En me promenant ce matin dans le centre-ville de Montréal, je n’ai pu m’empêcher de remarquer la présence omniprésente du fameux logo du hibou de Couche-Tard à presque chaque coin de rue. En tant que Montréalais, ces dépanneurs font partie de notre tissu urbain, tout comme les emblématiques machines à Slurpee de 7-Eleven le sont ailleurs. La fusion abandonnée aurait créé un géant des dépanneurs s’étendant sur plusieurs continents.

« Après une réflexion approfondie et des discussions avec la direction de Seven & i, nous avons décidé de retirer notre proposition, » a déclaré Brian Hannasch, président et chef de la direction de Couche-Tard. « Bien que nous croyions au potentiel considérable de création de valeur, nous respectons leur décision et continuerons à nous concentrer sur nos stratégies de croissance organique. »

Les analystes de la Banque Nationale suggèrent que l’échec de cette offre reflète des préoccupations croissantes concernant les obstacles réglementaires. « Ce retrait découle probablement des défis réglementaires anticipés sur les marchés clés, particulièrement au Japon et aux États-Unis, » explique Patricia Jolicoeur, analyste du commerce de détail. « L’entité combinée aurait fait face à un examen antitrust important en raison de leurs empreintes qui se chevauchent. »

L’accord proposé, évalué à environ 38,6 milliards de dollars canadiens selon des sources proches des négociations, aurait radicalement transformé le paysage mondial des dépanneurs. Couche-Tard exploite actuellement plus de 14 300 magasins en Amérique du Nord, en Europe et en Asie, tandis que Seven & i Holdings gère environ 77 000 magasins dans le monde sous diverses enseignes.

Jean St-Pierre, un client régulier de Couche-Tard avec qui j’ai bavardé à leur emplacement de la rue Sainte-Catherine, semblait imperturbable face à cette nouvelle. « Ces grandes transactions commerciales ne m’affectent pas beaucoup. Je veux simplement mon café et mes billets de loterie dans un endroit pratique, » a-t-il dit avec un haussement d’épaules qui capture parfaitement la perspective du consommateur moyen.

L’Institut économique de Montréal souligne que Couche-Tard a bâti son empire largement grâce à des acquisitions stratégiques. « Leur stratégie de croissance s’est historiquement appuyée sur l’acquisition de marques établies et l’amélioration de l’efficacité opérationnelle, » note Sophie Tremblay, chercheuse économique. « Ce revers pourrait temporairement ralentir leurs plans d’expansion mondiale, mais ne devrait pas faire dérailler leur stratégie à long terme. »

Ce n’est pas la première fois que Couche-Tard fait face à des défis d’acquisition. En 2021, leur tentative d’achat du détaillant français Carrefour a été bloquée par le gouvernement français pour des raisons de sécurité alimentaire. Malgré ces revers, l’action de Couche-Tard est restée relativement stable, reflétant la confiance des investisseurs dans les fondamentaux de l’entreprise.

De mon point de vue, après avoir couvert la scène des affaires montréalaises pendant plus d’une décennie, Couche-Tard représente l’une des histoires entrepreneuriales québécoises les plus impressionnantes. Fondée en 1980 avec un seul magasin à Laval, elle est devenue une puissance mondiale du commerce de détail. Cette résilience suggère qu’ils poursuivront probablement d’autres cibles d’acquisition qui s’alignent avec leur stratégie d’expansion.

Le Conseil québécois du commerce de détail indique que les dépanneurs font face à une concurrence croissante de divers secteurs. « Aujourd’hui, les détaillants de proximité sont en concurrence non seulement avec d’autres dépanneurs, mais aussi avec les magasins à un dollar, les pharmacies et même les services de livraison d’épicerie, » explique Robert Beaudoin, consultant de l’industrie. « L’échelle devient cruciale pour le pouvoir de négociation avec les fournisseurs et l’investissement dans la technologie. »

Pour l’avenir, Couche-Tard devrait poursuivre ses efforts de transformation numérique tout en explorant d’autres opportunités d’acquisition. L’entreprise a récemment élargi son offre de produits frais et amélioré les fonctionnalités de son application mobile pour répondre aux préférences évolutives des consommateurs.

En terminant mon café matinal acheté dans un Couche-Tard près de nos bureaux de LCN, je me suis demandé ce que cela signifie pour la réputation des affaires montréalaises sur la scène mondiale. Bien que l’offre infructueuse puisse sembler un revers, elle démontre également l’ambition et la vision mondiale des entreprises québécoises. Pour l’instant, ces deux géants des dépanneurs poursuivront leurs parcours séparés, le hibou de Couche-Tard et les bandes orange et vertes de 7-Eleven demeurant des concurrents plutôt que des partenaires dans le paysage mondial des dépanneurs.

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