Je viens de mettre les pieds sur le terrain du Rogers Centre quelques heures avant le match crucial numéro 3 entre nos Blue Jays de Toronto et les Dodgers de Los Angeles. Il y a une électricité dans l’air comme je n’en ai jamais ressentie en couvrant des événements torontois ces dernières années.
Le personnel du stade s’affaire autour de moi, préparant ce qui pourrait être un moment décisif dans l’histoire sportive de Toronto. Cette présence en Série mondiale marque la première des Blue Jays depuis leurs championnats consécutifs de 1992 et 1993, créant un point de ralliement générationnel qui a uni notre ville.
« Nous avons attendu 31 ans pour ce moment, » confie Marcus Thompson, détenteur d’un abonnement de saison depuis 1989, serrant son maillot vintage de Joe Carter. « Mon père m’avait emmené aux matchs de ’92 et ’93. Maintenant, j’y suis avec mes propres enfants. »
Après avoir partagé les deux premiers matchs à Los Angeles, la série se déplace à Toronto avec tout à jouer. La victoire dramatique des Jays lors du match 2—avec le circuit de Vladimir Guerrero Jr. en huitième manche—a donné à Toronto un espoir réaliste de remporter le prix ultime du baseball.
L’économie torontoise ressent l’effet Série mondiale. La Chambre de commerce de Toronto estime que chaque match à domicile génère environ 18 millions de dollars d’activité économique. Les hôtels affichent des taux d’occupation de 96%, tandis que les restaurants près du Rogers Centre sont complets depuis des semaines.
« Nous avons doublé notre personnel et prolongé nos heures d’ouverture, » explique Sophia Chen, propriétaire du Dugout Bar & Grill sur Blue Jays Way. « L’ambiance est incroyable—des partisans des deux côtes se mélangent, bien qu’il y ait définitivement plus de bleu des Jays que de bleu des Dodgers ici. »
La rotation des lanceurs des Jays demeure le point focal des analyses d’avant-match. Le gérant John Schneider a confirmé que Kevin Gausman prendra le monticule ce soir, avec Yusei Kikuchi prêt pour le match 4. Les Dodgers ripostent avec leur as Walker Buehler, préparant une fascinante bataille stratégique.
« L’avantage du terrain signifie tout dans des matchs comme ceux-ci, » note l’ancien lanceur des Blue Jays Pat Hentgen, que j’ai croisé à l’extérieur du stade. « L’énergie de cette foule donnera à nos gars un régime supérieur. Je me souviens encore de ce que ça faisait en ’93. »
Au-delà du stade, Toronto s’est transformée en ville de baseball du jour au lendemain. L’hôtel de ville est illuminé en bleu et blanc. Des fêtes improvisées pour regarder les matchs ont surgi dans les quartiers, des Beaches jusqu’à Etobicoke. La Commission de transport de Toronto a même ajouté des services supplémentaires après les matchs pour accommoder les partisans.
Les entreprises locales ont saisi l’occasion. La Baie a dévoilé une collection limitée Série mondiale des Blue Jays qui s’est épuisée en quelques heures. La brasserie torontoise Steam Whistle a lancé une « Bière de Série » commémorative qui s’arrache dans tout le Grand Toronto.
« Nous n’avons jamais vu une demande comme celle-ci, » admet le directeur des ventes Darren Williams à la boutique des Jays au CF Toronto Eaton Centre. « Les gens achètent tout ce qui porte le logo des Blue Jays. Nous réapprovisionnons toutes les heures et n’arrivons toujours pas à suivre. »
L’impact culturel va au-delà des produits dérivés. La Bibliothèque publique de Toronto signale une augmentation de 340% des emprunts de livres liés au baseball. Le Conseil scolaire du district de Toronto a autorisé des « journées tenues Blue Jays » tout au long de la série, suspendant temporairement les politiques d’uniformes dans les écoles participantes.
Les médias sociaux reflètent l’obsession de la ville. Les mots-clics liés au baseball torontois ont généré plus de 2,3 millions de publications la semaine dernière, selon la firme d’analyse des médias sociaux Keyhole. Les influenceurs locaux se sont tournés vers le contenu baseball, quelle que soit leur spécialité habituelle.
Pour la large population immigrante de Toronto, cette Série mondiale est devenue une porte d’entrée typiquement canadienne pour comprendre l’importance culturelle du passe-temps américain. L’organisation des Blue Jays a traduit les informations clés des matchs en 12 langues sur leur site web.
« Le baseball transcende les langues, » explique Carlos Diaz, qui dirige des programmes d’intégration des nouveaux arrivants au Bureau des nouveaux arrivants de Toronto. « Nous avons organisé des soirées de visionnement spécifiquement pour les immigrants récents. Ça devient leur première expérience torontoise partagée. »
À l’approche de l’heure du match, les enjeux ne pourraient être plus élevés. Un championnat placerait cette équipe des Blue Jays aux côtés des formations de ’92-’93 dans la légende sportive de Toronto. Cela validerait également la vision de la direction après plusieurs années de reconstruction.
Quoi qu’il arrive ce soir, Toronto a déjà gagné à bien des égards. La ville a redécouvert sa passion pour le baseball. Les quartiers se sentent plus connectés. Des étrangers entament des conversations sur les moyennes au bâton et les stratégies d’enclos.
« C’est plus que du baseball, » m’a confié la mairesse de Toronto Olivia Chow lors d’une visite d’avant-match à la tribune de presse. « C’est une question de fierté civique et de montrer au monde ce qui rend Toronto spéciale. »
Alors que les joueurs prennent le terrain pour l’échauffement, je ne peux m’empêcher de me sentir privilégié de documenter ce moment. Dans mes années à couvrir les innovations commerciales et les tendances culturelles de Toronto, peu d’histoires ont si complètement capturé le cœur de la ville.
Le match 3 nous attend. Toronto est prête.