La fin de l’exemption tarifaire pour les petites entreprises de Toronto suscite des inquiétudes

Michael Chang
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La dynamique communauté des petites entreprises de Toronto se trouve confrontée à des vents financiers contraires suite à la suspension soudaine par le gouvernement fédéral de l’exemption tarifaire de minimis. Ce changement de politique, annoncé la semaine dernière, élimine le seuil d’exemption de droits de douane de 150 $ qui permettait auparavant aux petits détaillants d’importer des envois de faible valeur sans payer de droits de douane.

En me promenant dans Queen West hier après-midi, je n’ai pu m’empêcher de remarquer les expressions inquiètes sur les visages des propriétaires de boutiques qui se rassemblaient en petits groupes devant leurs commerces. Plusieurs calculaient frénétiquement l’impact de ce changement sur leurs marges déjà serrées.

« Ça ne pouvait pas tomber à un pire moment, » explique Sophia Chen, propriétaire de Wanderlust Gifts sur l’avenue Ossington. « Nous sommes encore en train de nous remettre des pertes liées à la pandémie, et maintenant nous faisons face à une augmentation de 15-20% de nos coûts d’importation du jour au lendemain. C’est dévastateur pour une petite entreprise comme la mienne. »

L’Association des petites entreprises de Toronto estime qu’environ 4 300 petits détaillants locaux seront directement touchés par ce changement de politique. Leur récente enquête indique que 68% des entreprises concernées prévoient devoir augmenter leurs prix dans les 30 prochains jours.

L’exemption, initialement mise en œuvre pour réduire les charges administratives et faciliter le commerce transfrontalier, était devenue un avantage financier crucial pour les petits détaillants en concurrence avec les grandes chaînes disposant de réseaux de distribution internationale établis.

Marcus Williams, professeur d’économie à l’Université Ryerson, met la situation en perspective: « Les petites entreprises fonctionnent avec des marges extrêmement réduites. Quand on ajoute soudainement des tarifs à leurs coûts d’importation, beaucoup n’ont simplement pas le coussin financier pour absorber ces dépenses sans les répercuter sur les consommateurs. »

Le moment s’est avéré particulièrement difficile pour les détaillants qui se préparent à la saison des achats des fêtes. Plusieurs avaient déjà passé leurs commandes en se basant sur les structures de coûts précédentes, créant des problèmes immédiats de trésorerie.

« Je viens de finaliser mes commandes d’inventaire pour les fêtes le mois dernier, » dit Daniel Rosenthal, qui gère Gadget Galaxy dans le Distillery District. « Maintenant je fais face à des milliers de dollars de coûts inattendus. Est-ce que j’annule les commandes? J’augmente les prix? Il n’y a pas de bonnes options ici. »

Hier après-midi, j’ai assisté à une réunion organisée à la hâte au Dark Horse Espresso sur Spadina où une quinzaine de propriétaires d’entreprises se sont rassemblés pour discuter d’une action collective. Leur conversation reflétait à la fois frustration et détermination.

La conseillère municipale Ana Bailão a appelé à des mesures d’urgence pour aider les entreprises touchées. « Ces petits détaillants sont l’épine dorsale de l’économie de nos quartiers. Nous devons trouver des solutions rapidement avant de voir des fermetures. »

La Chambre de commerce de Toronto a lancé une campagne de plaidoyer exhortant le gouvernement fédéral à reconsidérer le calendrier de ce changement de politique, sinon sa mise en œuvre globale. Leur déclaration souligne que les petites entreprises ont besoin d’un temps de transition adéquat pour ajuster leurs stratégies de prix et d’approvisionnement.

Pour les consommateurs, les effets d’entraînement se feront probablement sentir sur les rayons des magasins dans les semaines à venir. Les analystes de l’industrie prévoient des augmentations de prix de 10-18% sur de nombreux produits importés, des aliments spécialisés aux vêtements et à l’électronique.

Certains propriétaires d’entreprises explorent des alternatives créatives. Jennifer Morrison, propriétaire d’Eco Essentials sur Roncesvalles, me confie qu’elle établit rapidement des contacts avec des fabricants canadiens pour reconstruire sa chaîne d’approvisionnement. « Ça nous force à regarder localement, ce qui a des avantages environnementaux, mais la transition est douloureuse et certains produits ne sont tout simplement pas fabriqués ici. »

Le gouvernement fédéral défend ce changement comme nécessaire pour protéger les fabricants canadiens et assurer une concurrence équitable. Une déclaration du ministère des Finances indique que l’exemption avait été « exploitée au-delà de son objectif initial » et créait des « conditions de concurrence inégales » pour les producteurs nationaux.

Cependant, les critiques soulignent que de nombreux petits détaillants importent des produits uniques non fabriqués au pays, rendant l’argument de la protection concurrentielle moins pertinent dans certains secteurs.

Alors que la communauté des petites entreprises de Toronto absorbe ce choc politique, les consommateurs devront peut-être se préparer à des prix plus élevés tout en s’efforçant de soutenir les détaillants locaux pendant cette transition difficile. Les semaines à venir révéleront s’il s’agit d’un ajustement temporaire ou d’une restructuration plus fondamentale du paysage commercial de Toronto.

Ce qui ressort clairement de mes conversations à travers la ville, c’est que l’esprit entrepreneurial de Toronto demeure résilient, même si ce changement de politique met à nouveau à l’épreuve la capacité d’adaptation de notre communauté de petites entreprises.

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