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L’avenir du secteur énergétique à Calgary a fait l’objet d’une attention renouvelée hier lorsque la ministre fédérale de l’Infrastructure, Catherine McKenna, s’est adressée à un déjeuner bondé de la Chambre de commerce du centre-ville. Ses remarques visaient à trouver un équilibre entre les engagements climatiques du Canada et les préoccupations économiques de l’Alberta – un exercice d’équilibriste qui devient de plus en plus complexe.
« Calgary demeure au cœur de la transition énergétique du Canada, » a déclaré McKenna à l’audience composée de chefs d’entreprise et de représentants de l’industrie. « Nous devons construire des infrastructures qui répondent à la fois à nos besoins immédiats et à nos objectifs climatiques à long terme. »
La visite de la ministre survient dans un contexte de tensions croissantes entre Ottawa et l’Alberta concernant la politique énergétique. Les responsables provinciaux ont critiqué à plusieurs reprises les initiatives fédérales en matière de climat, les qualifiant de menaces pour les fondements économiques de la province. La mairesse Jyoti Gondek, qui a présenté McKenna lors de l’événement, a souligné la nécessité de politiques qui reconnaissent la position unique de Calgary.
« Notre ville possède l’expertise, la main-d’œuvre et la capacité d’innovation pour être leader tant dans l’énergie traditionnelle que renouvelable, » a affirmé Gondek. « Ce dont nous avons besoin, c’est d’une certitude politique et d’un soutien aux investissements. »
Le discours de McKenna a mis en lumière un programme d’infrastructure de 3,4 milliards de dollars destiné à l’Ouest canadien, dont environ 780 millions spécifiquement pour des projets dans la région de Calgary. Ces investissements cibleront la modernisation du réseau énergétique, les installations de captage du carbone et la recherche sur la production d’hydrogène – des secteurs que le gouvernement fédéral considère comme des ponts entre les systèmes énergétiques actuels et les besoins futurs.
La réaction de l’industrie a été prudemment optimiste. Sarah Thompson, PDG d’EnergySphere basée à Calgary, a noté que le financement représente un pas dans la bonne direction, mais s’est demandé s’il allait assez loin.
« L’ampleur de la transformation que nous entreprenons nécessite un soutien plus substantiel, » a déclaré Thompson après l’événement. « Nous apprécions la reconnaissance par la ministre de nos défis, mais l’écart entre l’ambition politique et la réalité du financement demeure important. »
Les perspectives économiques trimestrielles de la Chambre de Calgary, publiées la semaine dernière, ont identifié l’infrastructure énergétique comme la principale préoccupation des entreprises locales. Près de 68% des entreprises interrogées ont identifié l’incertitude réglementaire comme leur principal défi, suivi de près par l’accès au capital pour les projets de transition.
La présentation de McKenna incluait une reconnaissance de ces préoccupations, soulignant les initiatives de simplification réglementaire que son ministère a mises en œuvre au cours des huit derniers mois. Ces changements visent à réduire d’environ 30% les délais d’approbation des infrastructures critiques.
« Nous ne pouvons pas nous permettre des retards interminables, » a-t-elle affirmé. « Pas si nous voulons atteindre nos objectifs climatiques et maintenir notre compétitivité économique. »
La visite de la ministre a coïncidé avec la publication hier de nouvelles données de Statistique Canada montrant que l’Alberta est en tête du pays en termes de croissance des investissements dans les technologies propres, avec une augmentation de 23% d’une année sur l’autre. Les entreprises de Calgary représentent près de la moitié de cette expansion, particulièrement dans les technologies géothermiques et de gestion du carbone.
L’économiste local de l’énergie Peter Tertzakian de l’ARC Energy Research Institute m’a confié après l’événement que le message de McKenna représente un changement subtil mais important dans le positionnement fédéral.
« On reconnaît de plus en plus que la transition énergétique doit inclure plutôt qu’exclure les acteurs existants, » a expliqué Tertzakian. « L’accent mis par la ministre sur la construction à partir des forces actuelles plutôt que de repartir de zéro suggère qu’une approche plus pragmatique s’installe à Ottawa. »
Pendant la période de questions, plusieurs participants ont pressé McKenna sur la politique des pipelines – un sujet perpétuellement controversé. Ses réponses ont souligné l’engagement du gouvernement envers les projets déjà approuvés tout en évitant des engagements spécifiques pour de nouvelles infrastructures de transport.
Ce positionnement prudent reflète la corde raide politique sur laquelle marchent les responsables fédéraux lorsqu’ils s’adressent aux auditoires de Calgary. La reprise économique de la ville reste étroitement liée à la santé du secteur énergétique, mais on reconnaît de plus en plus la nécessité d’une transition parmi les leaders de l’industrie.
Je couvre le secteur énergétique de Calgary depuis près d’une décennie, et le ton lors de l’événement d’hier était sensiblement différent des rassemblements similaires d’il y a trois ans. Il y a moins de postures défensives et plus de positionnement stratégique sur la façon dont l’expertise énergétique de Calgary peut évoluer plutôt que simplement persister.
Le ministre provincial de l’Énergie, Brian Jean, qui a assisté à l’événement sans y prendre la parole, a publié une déclaration par la suite appelant à « plus que des paroles de soutien » de la part du gouvernement fédéral.
« Les Albertains ont besoin d’actions concrètes qui respectent la juridiction provinciale et reconnaissent l’importance continue du développement responsable des ressources, » a déclaré Jean.
La visite de McKenna se poursuit aujourd’hui avec des visites des installations du Clean Resource Innovation Network et des rencontres avec des leaders d’entreprises autochtones axées sur les opportunités de partenariat dans le paysage de la transition énergétique.
Le financement des infrastructures annoncé hier commencera à être distribué en septembre, selon le calendrier fédéral, les candidatures pour les projets ouvrant le mois prochain. La ministre a souligné que les propositions démontrant des avantages tant économiques qu’environnementaux recevront une considération prioritaire.
Pour le secteur énergétique de Calgary, naviguer entre ces deux impératifs est devenu le défi déterminant de cette décennie. Le cadre politique présenté hier apporte quelques précisions supplémentaires, mais de nombreuses questions demeurent quant à la mise en œuvre et aux mécanismes de soutien à long terme.
En observant l’échange de cartes de visite après la fin du programme officiel, j’ai remarqué que les discussions de réseautage étaient centrées sur la façon dont les entreprises pourraient se positionner pour accéder au nouveau financement tout en s’adaptant aux réalités politiques en évolution. Cette approche pragmatique – plutôt que le débat idéologique – représente peut-être le changement le plus significatif dans le paysage énergétique de Calgary.