J’ai rencontré David Plamondon lors d’une après-midi venteuse d’Edmonton à une exposition d’entrepreneuriat autochtone locale. Installé dans un modeste stand de coin, il ne vendait pas d’artisanat traditionnel comme beaucoup d’autres—il invitait plutôt les gens à jouer. Pas n’importe quels jeux, mais ceux qu’il avait méticuleusement conçus pour refléter les enseignements, les histoires et les visions du monde autochtones.
« Le jeu crée cet espace unique où nous pouvons partager la culture sans que cela ressemble à une conférence, » m’a confié Plamondon, ses yeux s’illuminant tandis que des enfants et des adultes se rassemblaient autour de sa table. « Quand les gens s’amusent, ils sont plus ouverts à l’apprentissage.«
En tant qu’entrepreneur Anishinaabe d’Edmonton, Plamondon s’est taillé une niche distinctive dans le paysage entrepreneurial autochtone grandissant de notre ville. Son entreprise, Indigenous Gaming Enterprises, développe des jeux de société, des jeux de cartes et des applications numériques qui incorporent des éléments culturels, des histoires et des langues des Premières Nations, des Métis et des Inuits.
« J’ai vu ce fossé entre les méthodes d’enseignement culturel traditionnelles et la façon dont les jeunes générations interagissent avec le monde, » explique Plamondon. « Les jeux comblent naturellement ce fossé. »
Le parcours pour devenir le principal entrepreneur autochtone de jeux d’Edmonton n’a pas été simple. Plamondon a travaillé auparavant dans le secteur des services sociaux, où il a constaté de première main le besoin d’outils éducatifs culturellement pertinents. Son expérience dans les programmes pour jeunes au Centre d’amitié autochtone canadien lui a permis de comprendre comment des activités engageantes pouvaient faciliter la connexion culturelle.
« Les jeunes décrochaient pendant les sessions d’enseignement traditionnelles, mais s’animaient pendant les jeux, » se souvient-il. « Cela m’a fait réfléchir—et si les jeux eux-mêmes étaient les enseignements?«
Sa première création, « Quatre Directions, » un jeu de cartes stratégique basé sur les enseignements de la Roue Médicinale, a pris deux ans à développer. La collaboration étroite avec des aînés et des gardiens du savoir a assuré l’exactitude culturelle tout en maintenant la jouabilité—un équilibre que Plamondon considère essentiel.
« L’authenticité culturelle ne peut être compromise, mais le plaisir non plus. Si ce n’est pas agréable, les gens ne s’y engageront pas assez longtemps pour absorber les éléments culturels, » dit-il.
La scène ludique d’Edmonton a adopté l’approche innovante de Plamondon. Le Table Top Café, un lieu populaire de jeux local, organise régulièrement des Soirées de Jeux Autochtones où les joueurs curieux peuvent essayer ses créations tout en apprenant les perspectives autochtones.
Lewis Cardinal, un leader communautaire autochtone éminent d’Edmonton, a salué le travail de Plamondon lors d’un récent rassemblement communautaire. « Ce que David fait représente l’expression moderne de nos traditions de narration. Il prend notre sagesse ancienne et la présente à travers des moyens contemporains qui parlent aux générations d’aujourd’hui. »
L’impact s’étend au-delà du divertissement. Plusieurs écoles d’Edmonton ont intégré les jeux de Plamondon dans leur programme, soutenant particulièrement l’intégration des perspectives autochtones conformément aux engagements de Vérité et Réconciliation d’Alberta Education.
Jacqueline Grenier, une enseignante de 4e année à l’école élémentaire Riverdale, a partagé son expérience : « Ces jeux ont transformé la façon dont mes élèves s’engagent avec le contenu autochtone. Les concepts culturels s’ancrent parce qu’ils les expérimentent plutôt que de simplement en entendre parler. »
Le dernier projet de Plamondon aborde la préservation linguistique, une préoccupation urgente pour de nombreuses communautés autochtones. « Nehiyaw Speaks, » une application mobile ludique, enseigne les bases de la langue crie à travers des défis interactifs et la narration. Développée en collaboration avec des locuteurs cris de Maskwacis, l’application a été téléchargée plus de 7 000 fois depuis son lancement il y a quatre mois.
« La langue porte notre vision du monde, » explique Plamondon en démontrant l’application. « Quand vous apprenez à dire ‘askîy’ au lieu de ‘terre,’ vous n’apprenez pas seulement une traduction—vous absorbez une relation avec le territoire qui est intégrée dans ce mot. »
Le parcours entrepreneurial n’a pas été sans défis. Obtenir du financement s’est initialement avéré difficile, car le concept de Plamondon ne correspondait pas parfaitement aux catégories traditionnelles de subventions commerciales ou culturelles. Le soutien est finalement venu par les Services aux entreprises autochtones de Business Link et la Alberta Indian Investment Corporation, qui ont reconnu le potentiel de son approche unique.
« L’écosystème commercial s’adapte lentement pour comprendre que l’entrepreneuriat autochtone peut avoir une apparence différente, » note Plamondon. « Nos entreprises ont souvent la revitalisation culturelle et le bien-être communautaire intégrés dans leur mission fondamentale, pas seulement comme initiatives de responsabilité sociale complémentaires. »
Cette orientation communautaire reste au cœur du travail de Plamondon. Il anime régulièrement des ateliers dans les espaces de rassemblement autochtones d’Edmonton, enseignant la conception de jeux comme forme de narration moderne. Ces sessions ont inspiré plusieurs jeunes créateurs autochtones à développer leurs propres jeux.
« Le succès ne se mesure pas seulement aux ventes, » réfléchit-il. « Il s’agit de créer des méthodes durables de transmission culturelle qui fonctionnent pour les générations futures. »
Alors que le paysage culturel de notre ville continue d’évoluer, des entrepreneurs comme Plamondon représentent l’esprit d’innovation qui fait avancer la réconciliation par des approches pratiques et engageantes. En fusionnant les connaissances traditionnelles avec des médiums contemporains, il a créé quelque chose d’uniquement edmontonnien—enraciné dans les enseignements originaux du territoire tout en embrassant les expressions modernes.
« Les jeux ont toujours fait partie des cultures autochtones, » m’a rappelé Plamondon en concluant notre conversation. « Je n’invente rien de nouveau—je poursuis une tradition d’une manière qui parle à la réalité d’aujourd’hui. »
Pour ceux qui souhaitent expérimenter ces jeux culturels, les produits d’Indigenous Gaming Enterprises sont disponibles dans plusieurs boutiques locales, notamment chez Audrey’s Books et Mother Earth Essentials, ainsi que sur leur site web.
Dans un monde souvent divisé par les écrans et l’isolement, le travail de Plamondon offre quelque chose de plus en plus précieux—des occasions de se rassembler, d’apprendre et de se connecter par le jeu, tout en renforçant la compréhension des cultures autochtones qui ont façonné notre ville bien avant qu’elle ne porte son nom actuel.