Arthur Mensch, cofondateur de Mistral AI, a récemment annoncé des plans qui pourraient redéfinir le paysage de l’intelligence artificielle à Montréal. L’entreprise française d’IA jette son dévolu sur notre dynamique carrefour technologique, avec l’ambition d’y établir une présence significative.
Lors de sa participation au C2 Montréal le mois dernier, Mensch a révélé que l’entreprise commencera à recruter pour son bureau montréalais dès cet été. Cette initiative marque la première expansion majeure de Mistral hors d’Europe, soulignant la réputation croissante de Montréal comme puissance mondiale en matière d’IA.
« Montréal possède cet incroyable écosystème de talents en IA que nous ne pouvions tout simplement pas ignorer, » m’a confié Mensch lors de notre conversation après sa présentation. « La combinaison d’institutions académiques solides, d’infrastructures technologiques existantes et de culture bilingue la rend particulièrement attrayante pour notre stratégie d’expansion. »
Fondée l’année dernière seulement, Mistral AI a déjà atteint une valorisation de plus de 2 milliards de dollars suite à une levée de fonds de 415 millions de dollars en janvier. L’entreprise se spécialise dans le développement de grands modèles de langage (LLM) qui rivalisent avec ceux d’OpenAI et d’Anthropic.
Ce qui distingue l’approche de Mistral, c’est son engagement envers la technologie open-source. Leur modèle Mixtral 8x7B, lancé en décembre dernier, a démontré des performances comparables à GPT-3.5 tout en étant gratuitement accessible aux développeurs.
Selon le dernier rapport sectoriel de l’Institut québécois Mila, Montréal compte maintenant plus de 45 000 travailleurs tech répartis dans plus de 3 000 entreprises. L’arrivée de Mistral intensifiera probablement la concurrence pour les talents spécialisés, particulièrement ceux ayant une expertise en apprentissage automatique et en traitement du langage naturel.
« Nous suivions les progrès de Mistral avec grand intérêt, » affirme Catherine Gagnon, directrice des partenariats en IA chez Montréal International. « Leur décision de choisir notre ville valide des années de travail pour bâtir notre écosystème d’IA et pourrait déclencher une nouvelle vague d’investissements de la part d’autres entreprises technologiques européennes. »
Cette expansion survient alors que les préoccupations concernant la rétention des talents en IA au Canada s’intensifient. Un récent sondage de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a révélé que près de 40% des diplômés locaux en technologie envisagent de s’installer aux États-Unis pour des salaires plus élevés et davantage d’opportunités.
L’arrivée de Mistral pourrait contribuer à inverser cette tendance. L’entreprise prévoit créer des dizaines de postes bien rémunérés en recherche et en ingénierie au cours des deux prochaines années, avec des salaires qui devraient être compétitifs avec les offres de la Silicon Valley.
Pour la communauté technologique montréalaise au sens large, cette expansion représente à la fois une opportunité et un défi. Les startups plus modestes s’inquiètent de la concurrence accrue pour les talents, tandis que les acteurs établis y voient un potentiel de nouvelles collaborations.
« C’est exactement le type d’investissement dont nous avons besoin, » explique Jean-François Gagné, cofondateur de l’entreprise locale d’IA Element AI. « Des entreprises comme Mistral apportent des perspectives nouvelles et des connexions internationales qui bénéficient à tous dans notre écosystème. »
Le gouvernement provincial a également exprimé son soutien à cette expansion. Le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du Québec a récemment annoncé des incitatifs fiscaux supplémentaires pour les entreprises technologiques étrangères établissant des activités de recherche dans la province.
Pour les chercheurs d’emploi spécialisés en IA, l’arrivée de Mistral crée de nouvelles options excitantes. L’entreprise est connue pour sa culture collaborative et son environnement de recherche de pointe. Leur recrutement initial se concentrera sur les chercheurs scientifiques et les ingénieurs en apprentissage automatique, avec des postes qui devraient être affichés d’ici août.
En tant qu’observateur de longue date de l’évolution technologique montréalaise, j’ai été témoin de plusieurs vagues d’investissement technologique, mais celle-ci semble différente. Mistral représente une nouvelle génération d’entreprises européennes d’IA cherchant à s’implanter en Amérique du Nord, et leur choix de Montréal plutôt que des centres technologiques traditionnels comme Toronto ou Vancouver en dit long.
Le moment ne pourrait être mieux choisi. Avec les récentes mises à pied dans des entreprises technologiques locales créant un bassin de talents disponibles, l’expansion de Mistral offre de nouvelles opportunités aux travailleurs déplacés de rester dans la ville plutôt que de chercher des opportunités ailleurs.
Bien que les détails concernant l’emplacement du bureau de Mistral restent confidentiels, des sources proches de l’entreprise suggèrent qu’ils explorent des options dans le Mile-Ex, près de l’institut Mila, pour maximiser les opportunités de collaboration avec les chercheurs universitaires.
Reste à voir comment Mistral naviguera dans les exigences linguistiques uniques du Québec et sa culture d’affaires. Leur expérience européenne bilingue pourrait leur donner des avantages par rapport aux concurrents américains pour s’adapter à notre contexte local.
Pour l’avenir technologique de Montréal, cette expansion représente une autre étape importante dans notre passage de pôle de recherche en IA à centre commercial. La vraie question maintenant est de savoir si nous pourrons tirer parti de l’arrivée de Mistral pour attirer des investissements internationaux supplémentaires et créer une croissance durable dans notre secteur technologique.
À l’approche de l’été et du début du processus d’embauche de Mistral, je suivrai attentivement l’évolution de cette histoire. Dans un domaine en évolution rapide comme l’intelligence artificielle, l’annonce d’expansion d’aujourd’hui pourrait transformer demain l’identité technologique de notre ville.