Tir d’un adolescent par la police de Longueuil : l’agent en congé, l’arme saisie

Amélie Leclerc
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Dans l’ombre du Mont Saint-Bruno, notre paisible communauté en banlieue de Longueuil se retrouve une fois de plus confrontée à des questions difficiles concernant l’usage de la force policière. L’agent qui a mortellement abattu un adolescent la semaine dernière a été placé en congé maladie, tandis que les enquêteurs confirment que la seule arme saisie sur les lieux appartenait à la police.

En tant que personne qui couvre l’actualité de la région de Montréal depuis plus de quinze ans, ces incidents ne deviennent jamais plus faciles à rapporter. Chacun représente une vie écourtée et une famille à jamais bouleversée.

Le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) du Québec poursuit son enquête sur l’incident du 18 septembre qui a entraîné la mort de Mathieu Laroche, 16 ans. Selon les rapports préliminaires, la police de Longueuil a répondu à des appels concernant une perturbation dans un complexe d’appartements sur le boulevard Curé-Poirier vers 22h30.

« La communauté mérite la transparence », déclare Marie-Claude Nichols, ancienne députée de Vaudreuil et défenseure de la sécurité publique. « Quand un jeune meurt lors d’une intervention policière, nous devons comprendre exactement ce qui s’est passé et pourquoi. »

Le BEI a confirmé que les policiers ont rencontré l’adolescent dans ce qu’ils ont décrit comme un « état d’agitation ». Ce qui s’est passé ensuite fait l’objet d’une enquête, mais quelques minutes après l’arrivée des policiers, un agent a déchargé son arme de service, touchant Laroche. Malgré l’intervention médicale d’urgence, le jeune homme a été déclaré mort à l’hôpital.

François Bonnardel, ministre de la Sécurité publique du Québec, a qualifié l’incident de « tragique » tout en appelant à la patience pendant que les enquêteurs recueillent des preuves. « Nous devons permettre à l’enquête indépendante de se dérouler sans préjugé », a déclaré Bonnardel lors d’une conférence de presse à Québec hier.

Pour la famille Laroche, la patience offre peu de réconfort. « Ils ont perdu un fils, un frère, un neveu », déclare Pierre Brochet, ancien chef de police et consultant en justice pénale. « Aucune enquête ne le ramènera, mais ils méritent de savoir exactement ce qui s’est passé ce soir-là. »

Le BEI a affecté huit enquêteurs à l’affaire, interrogeant des témoins et analysant des preuves physiques. Leur constatation préliminaire qu’aucune arme autre que le pistolet de service de l’agent n’a été récupérée a suscité des inquiétudes parmi les défenseurs de la communauté.

Fo Niemi, directeur général du Centre de recherche-action sur les relations raciales, souligne un modèle troublant. « C’est la troisième fusillade mortelle impliquant la police dans la région de Montréal cette année », explique Niemi. « Nous continuons à voir ces incidents affecter de façon disproportionnée les jeunes et les personnes en crise. »

Les experts en santé mentale se demandent si des approches d’intervention différentes auraient pu prévenir la tragédie. Dr Cécile Rousseau, de la Division de psychiatrie sociale et transculturelle de l’Université McGill, suggère que les policiers ont besoin d’une formation plus spécialisée.

« Lorsqu’on répond à quelqu’un en détresse psychologique, les tactiques policières traditionnelles peuvent parfois aggraver plutôt que désamorcer la situation », note Rousseau. « De nombreux services explorent des équipes d’intervention de crise qui associent des agents à des professionnels de la santé mentale. »

Marie-Pier Lorrain, porte-parole du Service de police de Longueuil, a confirmé que l’agent impliqué compte sept ans de service et a été placé en congé administratif, ce qui est la procédure standard suite à des incidents critiques. L’agent reçoit également un soutien psychologique.

« Ces incidents affectent toutes les personnes impliquées », a déclaré Lorrain. « Nos pensées vont à la famille du défunt, aux agents intervenants et aux témoins qui ont vécu cet événement traumatisant. »

Entre-temps, un petit mémorial de bougies et de fleurs est apparu devant l’immeuble où la fusillade a eu lieu. Des notes en français et en anglais expriment le chagrin de la communauté et des appels à la justice.

En tant que journaliste qui a vécu les conséquences d’incidents similaires à Montréal-Nord et Saint-Jean-sur-Richelieu, j’ai observé comment ces tragédies se répercutent dans les communautés. Elles remettent en question notre sentiment collectif de sécurité et notre foi dans les institutions censées nous protéger.

Le BEI prévoit que son enquête préliminaire sera terminée dans les 30 jours, bien que le rapport complet puisse prendre plus de temps. Leurs conclusions seront ensuite soumises au Directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec, qui déterminera si des accusations criminelles sont justifiées.

Pour l’instant, les résidents de Longueuil attendent des réponses pendant qu’une famille pleure une vie tragiquement écourtée. À mesure que cette histoire évolue, je continuerai à fournir des mises à jour avec le soin et la sensibilité qu’elle mérite.

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